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Club de lecture, Le Tripode

Paresse pour tous, Hadrien Klent, éd. Le Tripode

Voici la dernière lecture commune de notre Club de lecture et autant dire que l’enthousiasme était au-rendez-vous pour ce livre iconoclaste.

Sous la forme d’un roman, l’auteur nous propose une réflexion sur le travail et le temps qu’on y consacre tout au long de notre vie. Son personnage principal, Emilien Long, est un prix Nobel d’économie français qui doit normalement sortir un nouveau livre mais, comme il le dit à son éditrice, il n’a pas très envie de faire un nième livre d’économie, il voudrait autre chose. Et justement, le confinement passe par là. Voilà Emilien, cloîtré dans son cabanon près de Marseille avec son ordi, son hamac et du temps devant lui. Justement, en général, du temps, il n’en a pas beaucoup entre ses conférences, ses cours, ses enfants et la maison à tenir. Cette pause forcée lui rappelle un livre paru à la fin du 19° siècle, Le droit à la paresse de Paul Lafargue, Emilien décide donc d’écrire en septembre 2020 une nouvelle version de ce livre  » Le droit à la paresse au 21° siècle ». Le livre devient immédiatement un succès. Emilien Long, qui n’avait pas pensé à ça, est convaincu par ses amis de créer un nouveau parti politique pour se présenter aux élections présidentielles de 2022. Le but de ce parti ? « Sortir d’un productivisme morbide pour redécouvrir le bonheur de vivre ». L’idée de base est que grâce à une journée de 3 heures de travail, le reste du temps pourrait être consacré au bien-être collectif. « Une France apaisée, salubre, sereine, produisant moins de biens inutiles, plus de sens et plus de bonheur ».

p 47 « Il va falloir (…) leur expliquer la différence entre paresse, la noble paresse, la riche paresse, et flemme., la molle flemme, la médiocre flemme. Leur dire que leur avenir ce n’est pas fumer des joints toute la journée pour célébrer Paul Lafargue, mais simplement d’inventer leurs choix individuels et collectifs, ce qu’il peuvent faire de leur temps libre – la paresse pour en tirer quelque chose de réel et pas pour le fuir, ce réel. La paresse dans un forme d’action. Ouvrir un espace, des espaces, et s’en servir pour remplir sa vie. La paresse comme une idée de la liberté, de la non-soumission aux contraintes du travail productiviste. »

Le début du roman est entrecoupé de quelques chapitres plus théoriques comme si nous lisions le traité d’Emilien Long et puis nous sommes réellement embarqués dans la création d’un nouveau parti politique et enfin dans la campagne à la présidentielle du héros. On se prend au jeu et la tension monte au fil du livre pour savoir si cet improbable candidat à la présidentielle française va gagner ou non le scrutin. Mais ça, à vous de le découvrir en lisant le livre !

Notre club de lecture est intergénérationnel, la benjamine a 23 ans et la plus âgée, aux alentours de 80 ans et pourtant ce livre a plu à presque tout le monde et surtout, nous avons eu les témoignages des deux plus jeunes du groupe qui nous ont dit qu’elles mettaient déjà ça en pratique et que leurs amis le faisaient également. Bien sûr, les indépendants du groupe ont objecté que ce serait difficile pour eux de renoncer à travailler pour servir leurs clients, si on ne répond pas, ils vont aller voir ailleurs. Oui, en effet, mais si tout le monde fonctionne ainsi, il y aura plus de travail pour tout le monde.

Pas facile d’entrer dans le postulat du livre mais rafraîchissant d’y penser en tout cas,

Voici les quelques commentaires des participants :

« C’est un roman qui donne de l’espoir, permet de voir vers quoi on veut aller », Fanny, 23 ans

« Amusant, ironie judicieuse » Nicole, 80 ans

« C’est un roman à thème et pourtant j’ai été pris par l’histoire ce qui n’est pas toujours le cas quand je lis ce genre de roman ». Philippe

« Ce livre m’a fait penser à une autre lecture : L’âge de la résilience de Jeremy Rifkin aux Liens qui libèrent ». Stéphane

« Un livre politique et pourtant on ne se dispute pas sur le sujet, incroyable ! Mais pour mettre cela en pratique, il va falloir changer les mentalités en commençant par soi-même ». Stéphane.

« livre atypique, je me suis laissée embarquer par l’idée, on a l’impression de marcher vers un avenir. » Audrey.

Voilà une lecture qui a plu et que nous vous conseillons vivement. Plus nombreux nous serons à l’avoir lu, plus vite on arrivera à une société apaisée ? Espérons.

Et si ça vous intéresse, l’auteur, qui utilise un pseudonyme, a déjà publié plusieurs livres.

Et qu’advienne le chaos en 2010, La grande panne en 2016 et 2020, et la suite de Paresse pour tous, intitulé La vie est à nous paru en 2023.

auteur belge, éditions Genese, Bernard Tirtiaux, Cherche midi, Gallimard, L'observatoire

Une partie de nos lectures du mois de janvier

La vie heureuse, David Foenkinos, éd. Gallimard :

Que diriez-vous de mourir pour mieux vivre ? Dans son dernier roman, Foenkinos explore le concept du frisson de la mort commercialisée à Séoul. Une histoire optimiste, touchante et drôle, explorant des sujets de société actuels tout en interrogeant sur le sens de la vie.

Un monde à refaire, Claire Deya, éd. de L’Observatoire :

Alors que la paix est presque atteinte, Français, Allemands et résistants se mettent en danger afin de déminer les plages du sud de la France. On suit Vincent, à la recherche de la femme qu’il aime et qui a disparu, Saskia, jeune survivante juive essayant de retrouver sa place, et Fabien, ancien résistant. Un premier roman tendre et émouvant sur la reconstruction d’une France (mais pas que) fracturée par la deuxième Guerre Mondiale.

L’écorché, Bernard Tirtiaux, Genèse édition :

En 2028, la vie tranquille du chirurgien et sculpteur Philippe est bouleversée par le retour d’Olga, son amour passé. Celle-ci, mère de Vlad, une icône engagée contre les injustices, le sollicite pour reconstruire le visage vitriolé de son fils. Impliqué malgré lui dans un mouvement mondial, Philippe doit naviguer à travers des pièges, mêlant amour et engagement sociétal.

Flamboyant crépuscule d’une vieille conformiste, Emmanuelle Pirotte, Le Cherche Midi édition :

Dominique, 81 ans, confrontée à la maladie d’Alzheimer, opte pour un adieu sans détour à sa vie, ses enfants et ses bibelots. Avec une férocité réjouissante, elle se débarrasse des conventions bourgeoises, offrant une perspective élevée sur l’Existence tout en triant ses souvenirs. Flamboyant crépuscule d’une vieille conformiste est le portrait d’une femme qui se lance, avec panache, dans un ultime face-à-face avec elle-même.

#librairieindependante#gembloux#littérature#nouveautéslittéraires

Actualité et animations

Lisez-vous le belge ?

Pendant tout le mois de novembre, les librairies et les bibliothèques mettent en avant les auteurs et les éditeurs belges. A la librairie, vous le savez, c’est tout au long de l’année que nous mettons les auteurs belges en avant. Nous avons reçu Michel Lambert fin septembre, Monsieur Nicolas pour les fêtes de Wallonie de Gembloux.

En novembre, nous avons plusieurs animations prévues :

Le mercredi 22 novembre à 16h30, c’est l’équipe des Marmottons qui viendra nous présenter ses très beaux albums conçus pour que le monde tourne plus rond.

Le mardi 28 novembre c’est Jérôme Colin qui nous parlera de son livre intitulés « Les Dragons » et paru aux éditions Allary. La rencontre se passera à la bibliothèque de Gembloux, rue des Oies 1a-2a car nous attendons du monde.

Pour ces deux animations, pensez à vous inscrire afin que nous puissions vous accueillir dans les meilleures conditions. 081/600.346 ou info@librairieantigone.be

Bande dessinée, Helvetiq, Pow Pow

Seek you. Un voyage dans la solitude contemporaine, de Kristen Radkte, Helvetiq

CQ-Seek youJe te cherche. Partant de ce souvenir d’un père émettant des appels radio solitaires comme des bouteilles à la mer, Kristen Radtke nous embarque pour Un voyage dans la solitude contemporaine, cette « épidémie silencieuse qui s’insinue partout, des grandes métropoles aux plus petits villages, et dont personne ne parle ». Un documentaire graphique très intéressant qui rappelle le récit (graphique, lui aussi) de la québécoise Catherine Ocelot, Symptômes.

De quoi et comment se tissent nos liens ? Quel est ce vertige de la solitude qui peut nous prendre alors même que nous sommes entourés ? A quel point le toucher est important pour se sentir exister et relié ? Deux albums complémentaires qui remuent les émotions au cœur de nos failles et de nos fragilités.

Nadège

Bande dessinée, Cambourakis

Je suis bordélique. Guide pour une vie désordonnée, Einat Tsarfati, Cambourakis

Une BD à offrir à tous les bordéliques – ou, si vous êtes ordonné, à lire pour mieux comprendre le désarroi de ces personnes de bonne volonté incapables de garder quoi que ce soit correctement rangé. Vous y apprendrez notamment qu’[e]n moyenne, au cours d’une année, un bordélique ordinaire décide au moins quinze fois qu’à partir de la semaine suivante, il commencera à mieux s’organiser, vous pourrez évaluer à quel point vous êtes bordélique, en quoi consiste le bordel (matériel et immatériel), comment l’affronter (car [l]a grande force du bordel, c’est qu’il est fuyant et rusé), mais aussi les avantages à être bordélique ! Et surtout, des trucs et astuces pour ranger sans ranger et accepter sans complexe sa nature désordonnée. Eclats de rire assurés si vous vous reconnaissez !

Nadège

Bande dessinée, Futuropolis, Futuropolis, Uncategorized

Le Grand Incident, Zelba, Futuropolis

Le grand incident est né d’une colère multiple : lorsqu’on a proposé à Zelba d’intégrer la collection de bandes dessinées « Musée du Louvre », aucune femme n’avait encore porté de projet seule dans cette collection (entretemps, Judith Vanistendael a publié Atan des Cyclades en novembre 2022) , aucune femme n’avait encore pris la direction du Louvre (c’est chose faite depuis la nomination de Laurence des Cars en 2021), le harcèlement de rue sévissait encore et toujours (ça ne s’est pas amélioré)…

Autre prise de conscience de l’autrice en visitant le Louvre à la recherche de l’inspiration : le nombre de représentations de nus féminins illustrant des scènes d’agression, sous couvert d’épisodes bibliques ou mythologiques. Et la lecture d’un fait a priori mineur, mais signifiant : les mains baladeuses des visiteurs sur ces statues.

De ce magma, Zelba a tiré une histoire aussi intelligente que fantasque : et si les nus féminins du Louvre décidaient de se révolter en s’invisibilisant au public, obligeant le Louvre à fermer ses portes ? Comment négocier avec des œuvres d’art offensées et exaspérées, tant par les regards de leurs acolytes de marbre que par le comportement de visiteurs indélicats ? Réjouissant !

Nadège

Grasset, littérature française, Rentrée littéraire, Romans

Coup de cœur de rentrée : A ma sœur et unique, Guy Boley, Grasset

Elisabeth Förster-Nietzsche est la sœur du célèbre philosophe. Entre eux, c’est l’amour fusionnel jusqu’à la rupture, aux retrouvailles et à la trahison. Elisabeth, diablesse opportuniste, est à la fois celle qui permettra la diffusion de l’œuvre de Nietzsche tout en n’hésitant pas la modifier, voire à la dévoyer. Nul besoin de connaître Nietzsche pour s’intéresser à cette histoire : amateurs de littérature et de belles écritures, vous savourerez la plume de Guy Boley.

Extrait :

Puis l’orage, épuisé, s’assied au sommet d’une colline, pose sa tête entre ses mains, essaie de reprendre son souffle, respire à pleins poumons et tente d’apaiser les battements de son cœur en expirant lentement tout l’air accumulé. Les chevaux de la foudre font tonner leurs sabots ; hennissent encore un brin et crachent par leurs naseaux de petits jets de brume, mais plus personne ne croit à leurs colères stériles. Déjà les blés, ruisselants d’eau, relèvent la tête et recoiffent leurs épis ; les corolles s’ébrouent ; tuiles et chéneaux cessent de sangloter. Et les hommes de quitter ces abris provisoires qu’à la hâte tout un chacun s’était trouvés, et d’allumer une pipe pour faire, à leur tour, de petits nuages blancs, bleus, avec entre leurs lèvres, en direction des cieux, un léger sourire d’effronterie. (p. 73)

Nadège

Actualité et animations, auteur belge, Espace Nord, Ker éditions, littérature belge, Littérature francophone, Litttérature de jeunesse, Prix Rossel, Romans

Les prochaines animations à la librairie Antigone

Chères amies et chers amis de la libraire,
Comme chaque année à cette période, tout le monde reprend ses activités après une coupure estivale permettant repos, lectures, et temps en famille ou entre amis.
Ce courrier a pour but de vous annoncer toutes les belles rencontres que je vous ai concoctées pour le trimestre à venir
Afin de ne pas faire de jaloux 🙂 , nous aurons des rencontres pour les adultes et pour les jeunes en partenariat avec la Bibliothèque de Gembloux rue des Oies ou avec le Centre Culturel l’Atrium dans le cadre du festival Sanza-ya-Congo initié par Ernage Animation.
Le mercredi 20 septembre à 19h30, nous recevons Michel Lambert pour son très beau roman intitulé Cinq jours de bonté édité aux éditions Le beau jardin et paru en mai. Ceux qui ont fréquenté la librairie depuis lors savent que c’est un de mes coups de cœur. D’une écriture magnifique, ce roman plein d’émotions nous conte l’histoire d’un homme qui retrouve sa femme après une séparation longue et difficile. C’est un portrait tout en délicatesse et nuances d’un homme de notre époque. Michel Lambert a déjà publié plusieurs romans et recueils de nouvelles et a reçu le prix Rossel en 1988 pour son roman, Vie d’oiseaux. Inscriptions souhaitées à la librairie.

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Le samedi 23 septembre à 15h, dans le cadre des fêtes de Wallonie à Gembloux, nous vous proposons une rencontre musicale avec Monsieur Nicolas, auteur compositeur pour enfants. Il viendra nous présenter son album « La tête dans les nuages » et chantera quelques chansons tirées de son spectacle. En partenariat avec la bibliothèque de Gembloux et la Ville de Gembloux. Inscriptions souhaitées au 081/600.346 ou à info@librairieantigone.be.

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Le lundi 25 septembre à 19h30, à la librairie nous vous proposons dans le cadre du festival sur le Congo 

SÁNZÁ YA CONGO une soirée sur les Lettres Congolais présentées par José Mabita et enrichie du témoignage de Lilia Bongi autrice du livre Amsoria qui a reçu le Grand Prix congolais du livre pour celui-ci.
Dans le cadre de ce festival, le mercredi 18 octobre à 18h, la librairie organise également une soirée avec la conteuse Ria Carbonez autour du  livre « La légende de la femme-oiseau » de Lilia Bongi inspiré de contes traditionnels de son enfance. Prix d’entrée 10€, à partir de 7 ans. lieu : Bibliothèque de Gembloux, rue des Oies 1a/2a, 5030 Gemblouxtout le programme sur le site de l’Atrium : 

https://atrium57.be/agenda/sanza-ya-congo/Toujours dans ce cadre mais hors programmation, le jeudi 5 octobre à 19h30, vous pourrez rencontrer Fabienne Zutterman qui publie aux éditions Empaj le roman 

L’Afrique pour se perdre. Dans ce roman autobiographique, Fabienne Zutterman parle de sa découverte de l’Afrique post-coloniale des années 70. Réservation souhaitée.

Le vendredi 13 octobre, dans le cadre de la Fureur de lire, nous rééditons en partenariat avec la bibliothèque de Gembloux, l’animation « Dévorons dans le noir ». Venez déguster un apéro dînatoire et découvrir un auteur belge édité dans la collection Espace Nord. 15€ tout compris, à la bibliothèque communale, rue des oies 1a/2a, le paiement tient lieu de réservation. 081/600.346

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Le mercredi 22 novembre à 16h30 à la librairie, l’équipe des Marmottons viendra nous chanter quelques chansons et nous présenter ses albums pour enfants. Leur slogan ? « Des histoires pour que le monde tourne plus rond » ! Ce sont des livres conçus pour se poser des questions et susciter la discussion. Découvrez « Plus vite Elliot, non d’une carotte ou encore Sur les pas de Sacha.  Réservation souhaitée à la librairie.

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Le mardi 28 novembre à 1930, Jérôme Colin, animateur littéraire bien connu de la RTBF et auteur de romans reviendra à Gembloux nous présenter son nouveau roman intitulé Les Dragons et paru aux éditions Allary. Les dragons c’est le mot inscrit sur le mur de cette institution psychiatrique pour adolescents dans laquelle est placé le héros suite à un décrochage scolaire et des faits de violence. L’auteur voudrait provoquer une prise de conscience du grand public sur le mal-être de nos jeunes et des conséquences que cela pourrait avoir sur notre société. Un livre utile et poignant ! A lire de toute urgence. La rencontre se fera à la Bibliothèque de Gembloux, rue des oies 1a/2a. Réservation souhaitée.

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Le jeudi 7 décembre à 19h30, nous terminerons l’année en beauté et en musique également avec la venue de Vincent Engel auteur de la série Le monde d’Asmodée qu’il vient de clôturer avec le roman Vous qui entrez à Montechiarro édité chez Ker. La soirée sera littéraire et musicale puisque nous aurons l’honneur d’écouter en primeur la musique composée par Line Adam pour illustrer La chanson de l’oubli de Giacolli qui parcourt tous les livres de la série. Réservation souhaitée.

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Et voilà, je crois qu’il y en a pour tous les goûts et tous les âges et que cela vous donnera l’envie de venir.
A bientôt ?
Laurence

Club de lecture, littérature jeunesse et adolescents

Club de lecture pour ado

Notre club de lecture ado qui reprend après quelques années d’arrêt Quand ? Une fois par mois, les jeudis 21/9, 19/10, 16/11 et 14/12 de 16h15 à 17h15. Comment ? On te prête un livre que tu présentes et tu parles d’un autre que tu as aimé. Où ? Pour être à l’aise, on se réunira chez Brioche Atelier, place de l’hôtel de ville n°6 à Gembloux. Combien ? 5€ la séance, boisson comprise.
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Décès de Jacques Gérard, fondateur de la librairie Antigone

C’est avec tristesse que je vous annonce que Jacques Gérard, fondateur de la librairie qui me l’avait cédée en 2005, est décédé fin août. Lorsqu’il a créé la librairie, en 1994, il avait à cœur de transmettre son amour des livres et des belles phrases.

Mais être librairie ce n’était pas que cela, disait-il, c’était également partager des idées, ouvrir les esprits. Il y a un peu plus d’un an, quand il est venu à la rencontre organisée avec Thomas Gunzig, il m’avait dit qu’il était heureux de constater que j’avais désormais dépassé le nombre d’années qu’il avait passées à la librairie.

Son bébé a survécu et s’est développé. J’en suis fière mais surtout je lui en suis reconnaissante car il a partagé avec moi son savoir pendant les quelques années que nous avons passées ensemble. L’année prochaine la librairie aura donc 30 ans et j’aurai une pensée émue pour lui car j’aurais voulu fêter cela avec lui.

Mais, comme l’ont souligné ses amis lors de son enterrement, Jacques était un homme joyeux, optimiste et qui avait toujours mille idées alors je vais suivre son exemple et vous parler dans un prochain article de notre programme de cette fin d’année en espérant qu’il vous donne envie de nous rejoindre pour une, deux ou toutes les activités proposées.

Actes Sud, J'ai lu, Littérature étrangère, poche, Romans

Littérature japonaise en poche

La Grande Traversée, Shion Miura, Actes Sud, Babel

La Grande Traversée, c’est l’épopée menant à la réalisation d’un nouveau dictionnaire. Araki, arrivé à l’heure de la retraite, trouve en Majimé, un jeune employé de sa maison d’édition, son digne successeur. Ce dernier, est tout aussi passionné par la langue japonaise et méthodique dans son travail qu’il est gauche et laborieux dans ses relations sociales. Or comment définir des mots dont on n’a jamais fait l’expérience ? L’amour, par exemple.


La Grande Traversée, c’est aussi l’éclosion de Majimé qui, s’il gardera toujours une forme de maladresse à la fois exaspérante et attachante, gagnera progressivement sa propre confiance et le respect des gens qui l’entourent.

La bibliothèque des rêves secrets, Michiko Aoyama, J’ai lu

De livres, d’amour, d’éclosion professionnelle et personnelle, il en est aussi question dans La bibliothèque des rêves secrets, de Michiko Aoyama. Chaque chapitre de ce roman choral est consacré à un personnage à la croisée des chemins, en quête de sens et d’une place dans la vie. Tous se retrouvent au centre social de leur quartier où ils font la rencontre d’une bibliothécaire qui les aidera, grâce à ces étranges et judicieux conseils, toujours accompagnés d’un « petit plus », à découvrir leur réponse à cette simple mais vertigineuse question : « Que cherchez-vous ? »

Au prochain arrêt, Hiro Arikawa, Actes Sud, Babel

Après Les Mémoires d’un chat où nous suivions les pérégrinations de Satoru et son chat Nana, Hiro Arikawa nous invite à embarquer à bord du train reliant Takarazuka à Nishinomiya… et retour. A chaque station des personnages montent ou descendent, se croisent, se rencontrent, s’observent, des phrases sont happées, des relations naissent, des encouragements et du réconfort sont apportés : un balai d’inconnus qui par le hasard de leurs trajets le deviennent un peu moins. A emporter impérativement lors de votre prochaine escapade ferroviaire !

Nadège

L'Atalante, Littérature étrangère, Littérature de l'imaginaire, Livre de poche, poche, Romans

Histoires de moine, de robot et d’héroïnes

Histoires de moine et de robot, Becky Chambers, L’Atalante

De la SF porteuse d’espoir et accessible aux non-amateurs, c’est ce que propose Becky Chambers avec les deux tomes de ses Histoires de moine et de robot : Un psaume pour les recyclés sauvages et Une prière pour les cimes timides.

Voilà bien longtemps, les robots ont accédé à la conscience. Alors que les Hommes leur ont proposé le statut de citoyen, les robots ont préféré rejoindre les forêts et mener une vie sauvage. Ils se sont cependant promis de revenir un jour prendre des nouvelles des humains. Quand commence Un psaume pour les recyclés sauvages, nous rencontrons Dex, moine qui a perdu le sens de son existence et décide de partir pour une sorte de pèlerinage en solitaire. C’est au cours de ce périple qu’iel rencontre Omphale, un robot qui s’est porté volontaire pour aller à la rencontres des humains. Les robots ont bien réfléchi à la question qu’Omphale devrait leur poser : « De quoi les gens ont-ils besoin ? »

Dans le second tome, Une prière pour les cimes timides, Dex et Omphale repartent ensemble vers le monde civilisé. A chaque personne rencontrée, Omphale pose sa question et comprend qu’elle n’est pas si évidente : elle dépend de chaque personne rencontrée. Dex de son côté redécouvre le monde à travers le regard de son compagnon, capable de s’émerveiller à répétition devant les choses les plus simples et les plus banales pour qui n’y prête plus attention.

Deux courts romans – moins de 300 pages, si on les additionne – qui posent pourtant des questions d’une grande profondeur et habitent longtemps la tête et le cœur du lecteur.

Les Dix Mille Portes de January et Eclats dormants, Alix E. Harrow, Hachette, Le Rayon Imaginaire

Le Rayon Imaginaire des éditions Hachette, c’est une collection qui invite à s’initier ou approfondir sa découverte des littératures de l’imaginaire. Trois romans d’Alix E. Harrow en font partie, dont deux sont disponibles à la librairie : Les Dix Mille Portes de January (désormais disponible en Livre de Poche) et Eclats dormants. Ces deux romans sont portés par des héroïnes capables de voyager entre les mondes.

January, d’abord, jeune fille habitant dans le manoir du riche employeur de son père. Celui-ci parcourt le monde à la recherche d’objets rares et est donc peu présent ; quant à sa mère, January, n’en a aucun souvenir. Quand January découvre qu’elle a le pouvoir de traverser des portes accédant à d’autres dimensions, c’est une véritable aventure qui commence !

Zinnia, quant à elle, héroïne du premier « conte fracturé » d’Alix E. Harrow, fête ses 21 ans et sait que ce sera certainement son dernier anniversaire, étant atteinte d’une maladie rare à laquelle personne n’a survécu au-delà de cet âge. A cette occasion, sa meilleure amie lui prépare une surprise : Zinnia ayant une passion pour la Belle au bois dormant, Charm lui a concocté une soirée thématique, allant jusqu’à se procurer un rouet auquel elle enjoint son amie à se piquer le doigt. Zinnia obtempère et se retrouve propulsée dans une pièce, face à une autre jeune femme s’apprêtant à faire le même geste. Zinnia l’en empêche et la voilà prise dans l’histoire de la princesse Primerose.

Une réinvention moderne et féministe de la Belle au bois dormant, dans laquelle les princesses ne sont pas si ingénues que la tradition aime à le laisser croire et sont bien décidées à contrecarrer le destin, encouragées par la force de la sororité.

Nadège

10/18, Albin Michel, L'Olivier, Littérature étrangère, littérature française, Romans

Cocktail estival : Histoire, humour et mystère

Le médecin de Cape Town, E. J. Levy, L’Olivier

Inspiré de la véritable histoire de Margaret Bulkley qui au 19ème siècle fut travestie dès son adolescence afin de suivre des études de médecine et vécu toute sa vie sous l’identité masculine du docteur James Barry, ce roman est à la fois un récit intime et une véritable aventure : si son secret était découvert, « le médecin de Cape Town » serait triplement menacé de mort pour travestissement, exercice illégal de la médecine par une femme, qui plus est au sein de l’armée. Une vie fascinante dont E. J. Levy s’est emparée avec brio. A noter, en fin d’ouvrage, un commentaire précisant ce qui relève des faits historiques et les événements modifiés pour le roman. Une excellente lecture pour les vacances !

Drame de pique, Sophie Hénaff, Albin Michel

Envie de légèreté et d’humour ? (Re)plongez-vous dans la série des « Poulets grillés » de Sophie Hénaff : une bande de bras cassés à qui l’on confie les dossiers les plus calamiteux, tout en les dépossédant des moyens les plus élémentaires pour les résoudre. Dans ce quatrième tome, la brigade est plus oubliée que jamais quand un nouveau directeur récemment promu et en manque d’effectif décide de les appeler en renfort : s’ils font leur preuve, ils seront réintégrés. Cela ne plaît pas à tout le monde dans l’équipe : chacun s’étant approprié leur commissariat de la rue des Innocents et appréciant échapper à la hiérarchie et à tous les protocoles administratifs légaux. Anne Capestan, cependant, accueille avec joie et ambition, ce possible retour en grâce. Alors qu’un agresseur à la seringue sévit dans Paris, Anne et son équipe reprennent du service. Comme toujours, c’est moins la résolution de l’énigme qui importe que l’humour de Sophié Hénaff et de ces attachants enquêteurs.

La disparition d’Audrey Wilde, Eve Chase, 10/18

Kate Morton résume ce livre ainsi : « des sœurs, des secrets et des mystères non résolus ». On ne pourrait mieux dire. Le roman s’ouvre sur une étrange scène nocturne, à la fin de l’été 1959 : quatre sœurs traînent un corps dans le jardin du manoir d’Applecote, en Angleterre. Cinquante ans plus tard, une famille recomposée : Will, Jessie, Bella – la fille de Will et sa défunte épouse Mandy – et Romy, la cadette. Londoniens, Will et Jessie cherchent une maison à la campagne : Jessie, particulièrement, qui ne supporte plus de vivre dans la maison où les souvenirs du premier mariage de Will sont partout.

Nous les rencontrons alors qu’ils visitent le manoir d’Applecote : Jessie est sous le charme. Certes, c’est loin de Londres et il faudra rénover quelque peu cette bâtisse abandonnée depuis longtemps, mais elle est si décidée, qu’elle finit par convaincre Will. Elle ne soupçonne pas le passé trouble qui hante le lieu et la passion dont Bella se prendra pour la mystérieuse disparition de la jeune Audrey Wilde des décennies plus tôt. Comment donner une place aux fantômes sans les laisser nous hanter, c’est la question à laquelle se trouvent confrontés les personnages de ce roman, tant dans le passé que dans le présent.

Nadège

Salamandre

Le pouls de la Terre, Ernst Zürcher, La Salamandre

Les livres de la collection « Marcher avec… » aux éditions de La Salamandre sont toujours la rencontre d’un point de vue nouveau sur la marche et la nature. Après le bédéiste Edmond Baudoin, c’est l’ingénieur forestier Ersnt Zürcher qui nous livre ses expériences au fil des chemins – de ses premiers pas à une longue marche vers la Méditerranée – et le fruit de réflexions élaborées au cours de ses recherches. Comme indiqué en quatrième de couverture : « Ce spécialiste des liens entre les arbres et leur environnement nous invite à renouer avec le vivant, à prendre son rythme à l’écoute de notre corps, de ce qui nous entoure et du cosmos, pour finalement retrouver le sens de l’essentiel et le goût de la joie. »

Une question perdure bien au-delà de la lecture :

Serons-nous enfin en mesure de (re)pratiquer un vrai « donner » et « recevoir », où la contrepartie aux bienfaits dont nous profitons de leur part [des arbres et des forêts] serait ce que nous avons de plus profond, de plus personnel et de plus précieux à offrir : notre émerveillement, notre mélodie, notre chant – qui fait également partie des chants de la nature ?

Nadège

littérature française, poche, Points - Seuil, Récit

Le lac magique, Yaël Cojot-Goldberg, Points, Seuil

Il avait suffi d’une soirée pour décider de partir vivre un an au Canada.

Alors qu’elle s’envole pour le Canada avec son mari (T.) et ses filles pour une parenthèse d’un an, Yaël Cojot-Goldberg est loin de s’imaginer l’expérience unique qu’elle s’apprête à vivre. En effet, dans la communauté de S. Estate, où la famille pose ses valises pour le premier mois de voyage – avant de rejoindre Montréal –, les femmes ont pour rituel matinal de se baigner nues dans un lac au milieu des bois. Dès le lendemain de leur arrivée, Leslie – la propriétaire de la maison louée par Yaël Cojot-Goldberg et son mari –, l’invite à se joindre au groupe. Surprise et ne sachant que répondre, elle se laisse convaincre grâce aux encouragements de T.

 C’est un monde inconnu ou trop peu exploré qui s’ouvre alors à elle : celui de sa féminité, du bonheur à ressentir la nudité de son corps dans la nature, le lien l’unissant à ces femmes d’âges et de corps variés, mais si semblables dans leurs différences. Ces marches vers le lac et ces baignades quotidiennes la mènent à s’interroger sur la femme qu’elle a délaissée en devenant mère (ou l’excuse que lui a fourni la maternité pour ne pas s’écouter), sur sa judéité (la communauté de S. Estate étant constituée de plusieurs familles juives qui avaient émigré ensemble), sur les relations qu’elle entretient ou a pu entretenir avec ses parents séparés peu de temps après sa naissance, sur sa condition de fille qui, en français, ne laisse pas la possibilité de s’émanciper du rôle familial qu’il nomme :

Tout est dit : on peut être un garçon et ne pas être un fils. Quand on est une fille, l’autre mot n’existe pas – du moins, en français. Pas moyen d’y échapper. Je n’ai pas pu choisir entre « girl » et « daughter ».

Au fil des jours, une forme de réconciliation et de sérénité intérieure se dessine jusqu’à donner naissance à ce récit intime et libérateur.

Nadège

auteur belge, Julliard, littérature belge

Au bord, Angelo Tijssens, Julliard

Angelo Tijssens est un réalisateur et dramaturge néerlandais. Au bord, son premier roman, a été salué par la critique en Flandre et aux Pays-Bas.

Le plan de ce livre est assez simple : à la mort de sa mère, un homme redécouvre les lieux de son enfance et part à la recherche de son amour de jeunesse. Son séjour lui rappelle son enfance difficile due à une mère alcoolique et oppressive, ainsi qu’à la découverte de son homosexualité.

Ce n’est pas un roman d’amour. C’est un roman sur l’amour. Ou plus justement, c’est un roman sur le non-amour.

Ce qui caractérise Au bord, c’est son langage poétique et brutal, ses successions de phrases courtes dénuées de contexte, ni lieu, ni heure, ni prénom, aucune description physique, tout le « superflu » est mis de côté.

Un premier roman intriguant à découvrir.

Fantasy/Science-fiction, Kennes, Littérature québécoise, Litttérature de jeunesse

Nozophobia – Mathieu Fortin

L’empeste, une maladie créée pendant la guerre dans un laboratoire d’Ouzbékistan, a décimé une bonne partie de la population.

Nozophobia est une cité hermétique, construite par la riche famille des Miersk qui gouverne, finance et « protège » ses citoyens de la maladie.

Tout le monde vit dans la hantise d’une contamination, puisque toute infection entraine un exil en dehors des murs de la ville.

Valek, le narrateur et personnage principal de l’histoire, s’est entrainé toute sa vie, depuis que son père a été exilé pour empeste, afin de devenir Désinfecteur (sorte de police des maladies dont le rôle est de tester les citoyens, de prendre en charge les contaminés…).

Un jour, alors qu’il rentre chez lui, l’alarme sonne. Les empestés s’introduisent dans l’enceinte de la ville. Alors qu’il devrait se mettre à l’abri, il assiste à la scène et découvre la vérité…

Nozophobia est un récit simple et fluide. Malgré quelques facilités scénaristiques, certains de ses aspects raisonnent en nous à la suite de la crise du covid.

Un roman parfait pour initier les ados à la science-fiction.

A partir de 13 ans.

Mythologie grecque, Rouergue

Pallas – Marine Carteron

Si les textes antiques nous ont appris le déclenchement de la Guerre de Troie ; l’enlèvement d’Hélène, femme de Ménélas, que nous disent-ils sur ce qu’il s’est passé avant ? Quels liens ont les dieux et la cité ?

Pallas, premier tome d’une nouvelle trilogie écrite par Marine Carteron, autrice notamment des Autodafeurs et Generation K, nous plonge aux prémices de la Guerre de Troie.

Ce roman polyphonique féminin est articulé autour de Pallas, fille de Triton et meilleure amie d’Athéna. Zeus la transformera en statue. Celle-ci réside au cœur de Troie, dans le Palladium, un sanctuaire où les femmes peuvent se réfugier.

On suit principalement le parcours d’Hésione, qui nous montre ce que c’est d’être une jeune femme dans la Grèce antique, une jeune femme qui a des envies de liberté, mais qui a cependant un rôle à tenir puisqu’elle est grande prêtresse d’Athéna. Sa mission : aider celle-ci à délivrer Pallas, emprisonnée quelque part, dans la cité de Troie, car Pallas est toujours là, pas vraiment morte, mais pas vraiment en vie non plus.

Si ce premier tome reste très introductif, la modernité apportée par l’autrice, de par son style et de par l’importance qu’elle donne à ces femmes, ne nous éloigne cependant pas du tragique des textes classiques.

Ce récit haletant et passionnant est à découvrir à partir de 14 ans.

D’autres livres à découvrir sur la mythologie grecque :

Actes Sud, arbre, Arthaud, Littérature étrangère, Littérature francophone, Romans, Stock

Des forêts et des hommes

Quel que soit le genre (roman, essais, beaux livres…), les arbres inspirent les auteurs. Les romans foisonnent : après, entre autres, le remarquable roman de Karl Marlantes, Faire bientôt éclater la terre, retraçant le parcours de trois immigrés finlandais aux Etats-Unis et l’engagement d’Aino – la soeur – dans la lutte pour les droits des travailleurs – en l’occurrence les bûcherons – à travers la constitution des premiers syndicats ; après l’autre passionnante saga forestière, Lorsque le dernier arbre, de Michael Christie, récemment parue en poche, ce sont les militants écologistes qui sont au cœur des romans de ce début d’année. En voici trois qui font le malheureux constat que, en des temps et des lieux différents, la forêt souffre et ceux qui la défendent ont bien du mal à faire entendre ses intérêts et ceux du vivant – dont l’être humain – en général.

Les derniers géants d’Ash Davidson, un premier roman publié chez Actes Sud, se déroule en 1977, en Californie du Nord, dans une communauté de bûcherons. Les protagonistes en sont un couple (Rich et Colleen) et leur fils (Chub). Rich a toujours rêvé – comme tous les hommes de la famille qui l’ont précédé – d’acheter la parcelle 24-7 (nommée ainsi d’après un énorme séquoia sis sur cette terre). L’occasion lui en est donnée au début du roman, moyennant un énorme prêt et la mise à sec des économies du couple en vue d’un deuxième enfant. Il va donc contracter ce prêt sans en parler à sa femme et se mettre une pierre autour du cou : l’angoisse de chaque échéance l’étreignant au plus haut point. Colleen, quant à elle fait fausse couche sur fausse couche et culpabilise. Quand un jour réapparaît son amour de jeunesse – mais nous ne sommes pas dans une bluette – qui revient pour aider sa mère, atteinte d’un cancer, et réaliser une étude sur la qualité des eaux de la région : des herbicides sont en effet épandus sur les parcelles pour faciliter l’accès aux séquoias.

S’ensuit un combat acharné entre les bûcherons (dont c’est le gagne-pain), les familles qui prennent peu à peu conscience de l’impact de ces produits sur les corps (on compte de nombreuses fausses couches, des enfants mort-nés ou malformés ; des animaux aussi) et les activistes écologiques. Et évidemment les patrons qui manipulent tout le monde en s’en mettant plein les poches sans aucun scrupule. Un roman qu’on imaginerait bien adapté au cinéma, tant Ash Davison a le sens du détail qui nous fait visualiser et entendre chaque scène.

Gabrielle Filteau-Chiba revient, quant à elle, avec un troisième roman. Après Encabanée et Sauvagines, nous retrouvons Anouk et Raphaëlle pour une aventure engagée et militante. Délaissant leur mode de vie solitaire, elles rejoignent d’abord une ferme communautaire. Si Raphaëlle évolue comme un poisson dans l’eau auprès de ses camarades retrouvés, Anouk a plus de difficulté à gérer la promiscuité, elle qui a depuis longtemps quitté la société pour une vie d’ermite. Elle s’y astreint cependant tant bien que mal. Parallèlement, nous suivons Riopelle, alias Robin, alias… autant d’identité pour un homme qui ne dévoilera vraiment la sienne qu’à la toute fin du récit. En effet, en tant qu’activiste écologique radical, celui-ci a abandonné toute attache personnelle pour servir pleinement la cause. Accablé par les conséquences d’une de ces actions – la mort d’un homme innocent –, il s’engage néanmoins dans un nouveau projet : sauvegarder forêt du Kamouraska menacée par un projet d’oléoduc. Anouk et Raphaëlle rejoindront elles aussi cette opération Bivouac. Celle-ci n’est pas sans risque : les écoguerriers sont prêts à payer cher leur engagement vital pour la Terre.

Vadim, presque trentenaire, n’a jamais travaillé, jamais eu de soucis d’argent, ne jure que par le bitcoin et n’a pas l’intention de mettre un terme à sa vie oisive. C’est sans compter sur la chute du bitcoin qui le met à sec. N’en démordant pas, il fait l’autruche, s’enferme dans son appartement, passant ses journées à jouer aux jeux vidéos et à se faire livrer des plats préparés. C’est n’est qu’en tout dernier recours qu’il se résout à accepter un travail. Nous le découvrons simple stagiaire, mais c’est une mission bien plus dangereuse qu’il s’apprête à remplir : sauver les forêts ukrainiennes détruites par un véritable système mafieux. Un roman sombre et violent d’un jeune auteur ukrainien, aujourd’hui sur le front.

Nadège

Actes Sud, Cherche midi, littérature belge, Romans, Société

Deux livres de littérature de l’imaginaire

Les lectures de Laurence

Les Reines d’Emmanuelle Pirotte, collection Cobra des éditions Le Cherche Midi.

C’est un roman qui mérite de rester en librairie longtemps. J’ai beaucoup aimé cette histoire d’amour contrariée sur fond d’épopée dans un monde qui a vécu l’apocalypse et donc les règles de société sont désormais édictées par des Reines. J’ai été happée par cette lecture et l’écriture d’Emmanuelle Pirotte n’y est pas pour rien car il n’y a aucun temps mort. Les personnages sont attachants, les aventures sont prenantes. Une belle lecture que je conseille vivement.

Du grand spectacle combiné à des enjeux Shakespeariens Sur les ruines de nos civilisations, un nouveau monde s’est bâti. L’humanité a renoncé au progrès matériel et retiré au sexe masculin ses anciens privilèges. Les royaumes sont désormais gouvernés par des femmes, autant de Reines que l’épreuve du pouvoir révèle parfois autoritaires et souvent rivales. Dans ce monde aux immenses espaces sauvages, des groupes de nomades, artisans, chasseurs et comédiens se croisent sur les vestiges des routes d’autrefois.
Parmi ces communautés, celle des Britannia, où les jeunes Milo et Faith brûlent d’un désir réciproque et néanmoins interdit. Leur attirance va provoquer le bannissement de Milo. Commence alors pour le jeune homme une longue errance à travers les terres du Nord ; mais si Milo espère retrouver Faith, il n’imagine pas combien son voyage obéit aux lois de la destinée – ce grand compas qui, toujours, nous entraîne vers nos origines.
Sous la surface agitée de l’épopée, Emmanuelle Pirotte installe le décor et les enjeux de la tragédie antique. Jalousies, tensions amoureuses, filiations cachées, prophéties et voeux de vengeance électrisent les personnages qui se donnent à toutes les passions. Et l’on retrouve enfin, loin des potions prudentes et morales, la plus aberrante et la plus formidable des littératures.

Les imparfaits de Ewoud Kieft, collection »Exofictions » des éditions Actes Sud

Alors que le roman de d’Emmanuelle Pirotte met en scène un monde qui a subi l’apocalypse obligeant les humains à vivre et survivre dans une nature hostile sans l’aide de la technologie, le postulat de Ewoud Kieft est tout autre.

2060. Le réchauffement climatique est passé par là, le capitalisme sauvage a réduit une bonne partie de la population au déclassement social mais l’intelligence artificielle s’est imposée dans la vie des hommes. IA est à la fois, guide pratique, coach de vie pour le travail ou en amour, elle vous permet d’accéder à vos jeux, à l’information en continu (mais seulement celle qui vous intéresse), elle surveille vos faits et gestes et vous donne sans cesse des conseils. C’est même bien plus que ça pour beaucoup, c’est une confidente qu’on appelle GENA.

Cas, un homme d’une trentaine d’année qui vit avec cette intelligence depuis son adolescence, Mais un jour Cas disparaît des radars de GENA qu’il a désactivé. Il a abandonné son appareillage qui le reliait au reste de cette société hypercontrôlée et a rejoint une caste dissidente appelée « Les Imparfaits ».

Comment cela a-t-il pu arriver ? Comment Gena n’a-t-elle pas compris se qui se tramait dans la tête de Cas ? Gena doit rendre des comptes aux autorités et elle s’interroge, en se remémorant la vie de Cas, sur ce qui a bien pu le pousser à déserter cette vie pourtant si bien réglée et si facile.

Un roman édifiant et très prenant qui pose de bonnes questions sur cette intelligence artificielle qui entre de plus en plus dans notre vie. Que voulons-vous en faire ? Jusqu’où voulons nous laisser cette IA interférer avec nos vies ? Comment garder notre libre-arbitre et notre esprit critique.

Une très bonne lecture que je vous conseille vivement.

Ecole des loisirs, Enquête, littérature française, Litttérature de jeunesse, Romans

Mémoires de la forêt. Les carnets de Cornélius Renard, Mickaël Brun-Arnaud, Ecole des Loisirs

L’an dernier, Mickaël Brun-Arnaud nous offrait un petit bijou de littérature jeunesse intitulé Mémoires de la forêt. Les souvenirs de Ferdinand Taupe. Poésie, tendresse, humour et jolies illustrations s’entremêlaient dans ce premier roman prometteur. Un an plus tard, le deuxième tome mettant en scène la forêt de Bellécorce et ses habitants est tout aussi réussi : sous-titrée Les carnets de Cornélius Renard, cette nouvelle aventure nous fait découvrir les origines de la librairie d’Archibald Renard. Mais c’est au terme d’une véritable aventure que se révèleront les secrets de cette fabuleuse création.

Alors qu’Archibald mène des jours paisibles dans sa librairie, conseillant ses clients et tentant laborieusement d’écrire son premier livre, alors que les festivités d’automne se préparent à Bellécorce et qu’une atmosphère joyeuse emplit les cœurs, surgit Célestin Loup. Cet inconnu se présente comme le véritable propriétaire de la librairie – preuves à l’appui – et accuse les Renard d’avoir spolié l’établissement de sa famille depuis trois générations. Archibald est aussitôt expulsé et mis à la rue par le maire de Bellécorce. Complètement désemparé, il se raccroche à un petit objet découvert dans ses maigres affaires : un carnet de son grand-père. Celui-ci y mentionne l’existence d’autres carnets dans lesquels il aurait rédigé l’histoire de sa vie et raconté la genèse de la librairie. Comprenant que ceci est son seul espoir pour éclaircir cette triste situation, Archibald part en quête des secrets de son grand-père, accompagné de son neveu Bartholomé, grand lecteur de romans policiers.

Un nouveau roman passionnant et touchant qui donne très envie de découvrir le troisième tome de la série, dont la parution est déjà annoncée pour la fin de cette année.

Nadège

Gallimard, L'Olivier, littérature française, Nouvelles - Théâtre - Poésie

Le retour d’un Prix Nobel et la découverte d’un prix Goncourt

En février dernier paraissait un nouveau recueil de nouvelles de Jean-Marie Gustave Le Clézio. Le prix de Nobel de littérature 2008 nous y donne des « nouvelles des indésirables » : ces hommes, ces femmes, ces enfants invisibles parce que nous refusons de les regarder. On y retrouve l’attention de Le Clézio aux êtres en marge, la qualité de son écriture et sa sensibilité. Tendresse particulière pour Maureez Samson, jeune orpheline à la voix d’or, qui donne son nom au premier texte du recueil, et à la nouvelle « Fantômes dans la rue » rendant le temps de quelques pages un corps et une vie à ces personnes sur lesquelles notre regard glisse trop souvent sans s’y attarder.

Autre recueil, paru en janvier et tout frais lauréat du Prix Goncourt de la Nouvelle : Partout les autres, de David Thomas. Des textes courts – d’un paragraphe à quelques pages – tour à tour incisifs, drôles ou touchants, toujours percutants. Un auteur à découvrir absolument. Et des textes parfaits pour les emplois du temps chargés : vite lus – et relus ! -, mais qui infusent longtemps.

Nadège

écosociété, Littérature québécoise, poche, Société

Le virus et la proie, Pierre Lefebvre, écosociété.

Le virus et la proie. Le lecteur comprendra le sens de ce titre à la fin de cet opuscule, la lettre de « quelqu’un possédant peu » à « quelqu’un qui possède beaucoup ». Un texte intense qui donne voix à l’impuissance et à la colère que nous pouvons tous ressentir face à une forme d’inhumanité du pouvoir et à l’impossibilité de trouver un lieu et un langage commun d’échange. On l’imaginerait bien au théâtre.

« Comment voulez-vous à ce moment-là que je parle avec quelqu’un qui se sert de tout, tout le temps. Surtout quand il n’y a pas de lieu, aucune institution, où il pourrait nous être donné de parler d’égal à égal. En pleine démocratie – parce qu’on est en démocratie, on n’arrête pas de le répéter, on est des démocrates, nous autres, on n’est pas des malades, des osties, des trous de culs –, en pleine démocratie, c’est quand même hallucinant de ne pas pouvoir trouver un seul endroit où il nous serait possible de nous croiser, monsieur, de nous reconnaître puis d’échanger comme du monde, je veux dire comme deux êtres participant, cahin-caha, à la même tâche impossible, intenable, celle de vivre.

C’est comme si tout était structuré pour empêcher une rencontre entre nous deux. Il n’y a plus d’institution, monsieur. Celles qui sont là n’en sont plus […] l’éducation n’éduque plus, elle passe le plus clair de son temps à tenter d’atteindre des pourcentages de diplomation ; la justice, elle, n’est plus qu’un pur rapport de forces et l’Etat, sous l’impulsion de la mondialisation, a tellement pris plaisir à se disloquer qu’il en a perdu sa souveraineté. Demandez-vous pas pourquoi les taux de participation aux élections s’amenuisent de fois en fois, plus personne n’y croit à vos carcasses vides. Je ne demande pourtant pas grand-chose. Je voudrais juste un espace où on se saurait liés les uns aux autres, et là non par le sang, le sol, la tradition, la foi, la volonté ou je ne sais quelle autre niaiserie, mais par le désarroi, l’humilité de se savoir humain, mortel et puis insignifiant, aussi. Je n’en vois pas, monsieur, d’endroits comme ça, d’endroits où il nous serait donné, à chacun d’entre nous, mais aussi à nous tous ensemble, d’être au monde ; d’être là, indéniablement, mais d’une manière inédite, autrement qu’à la job, que chez nous, dans notre char, le métro, le centre d’achats, notre lit. Mais un lieu comme ça, un lieu où être – juste ça, être –, je ne sais même plus si c’est possible, collectivement, d’en rêver un. »

Flammarion, Littérature québécoise, Romans

« Faire les sucres », Fanny Britt, Flammarion

Adam Dumont est un chef québécois renommé. Il présente sa propre émission de télévision. Il forme un couple épanoui avec Marion. Il est père de deux grands enfants avec lesquels il a peu de contacts, mais celui lui convient. Bref, Adam Dumont va bien et même très bien. Jusqu’au jours où tout bascule : alors qu’il surfe avec un de ses ami, Adam perd le contrôle de sa planche et heurte de plein fouet une jeune fille sur la plage, la blessant gravement. Adam prend conscience qu’il a failli mourir et qu’il a saccagé une autre vie. Dès lors, il plonge dans un autre monde, un monde de solitude où personne ne peut le rejoindre, où plus rien n’a de goût, dont la légèreté est exclue : il sombre dans la dépression. A partir de cet instant, la vie d’Adam se délite de toute part : son couple prend l’eau – la gentille et empathique Marion ne reconnaissant plus son mari finit par virer totalement –, son émission perd de l’audience, la relation avec sa fille dont il se voit contraint de s’occuper est très compliquée… Plus rien n’a de sens pour lui, si ce n’est un projet : l’achat d’une érablière. Produire lui-même son sirop d’érable, voilà qui lui rend un peu d’enthousiasme. Sans compter qu’il se prend d’affection pour la famille à qui il rachète la terre et dont il engage le fils, Sylvain. Mais cela suffira-t-il à lui faire remonter la pente ?

Fanny Britt exprime avec justesse cette descente aux enfers qu’est la dépression, les crises de panique, la perte de sens, la perte de soi. Elle montre aussi très bien l’impact que cette situation peut avoir sur les proches à la fois impuissants, agacés par le comportement incompréhensible d’un être aimé qui leur échappe. Sans jamais porter de jugements.

Littérature étrangère, Romans, Seuil

Cinq petits indiens, Michelle Good, Seuil, coll. Voix autochtones

Cinq petits indiens de Michelle Good vient de paraître dans une nouvelle collection aux éditions du Seuil : Voix autochtones. L’éditeur la présente ainsi :

La collection « Voix autochtones » donne la parole à tous les Peuples Premiers qui en ont été privés pendant si longtemps. Ces romans, si singuliers et pourtant si universels, nous font vibrer, nous émeuvent, nous entraînent sur des chemins que nous avons trop peu parcourus ensemble. De grandes voix littéraires sont nées et elles ont beaucoup à nous dire.

On ne peut qu’approuver à la lecture de ce premier roman qui donne corps et voix aux enfants des populations autochtones du Canada, enlevés à leurs familles pour intégrer des pensionnats en vue de les « civiliser » et de « tuer l’Indien en eux ». Etablissements dans lesquels ces enfants ont été maltraités, abusés, humiliés. On suit ici des survivants de ces pensionnats après leur sortie. Ce récit âpre et bouleversant permet de découvrir un pan d’histoire méconnu en Europe. Et pas si éloigné puisque ces pensionnats créés à la fin du XIXe siècle n’ont fermé définitivement qu’en 1996 ! 

Michelle Good, elle-même issue d’un peuple des Premières Nations, a travaillé pendant 20 ans dans l’accompagnement de ces survivants en tant qu’avocate. Cinq petits indiens est sans doute l’un des romans les plus émouvants et les plus intenses de ce début d’année.

littérature française, Récit, Récit de marche, Salamandre

« Quelques pas hors des cases », Edmond Baudoin, Salamandre

Depuis 2019, les éditions de La Salamandre invitent des personnalités à écrire sur leur rapport à la marche dans une jolie collection nommée « Marcher avec… » Certes la ligne n’est pas toujours respectée, il arrive que l’on presse un peu le pas ou que l’on roule avec Marie Dorin et Claude Marthaler, par exemple, mais ça n’en reste pas moins un plaisir de découvrir chaque nouvel opus (ou presque : celui d’Arnaud Villani étant l’exception qui confirme la règle).

L’originalité de cette collection est de sortir des sentiers battus en donnant la voix à des auteurs qui n’ont pas pour habitude d’écrire sur le sujet : Marie Dorin est une ex-sportive de haut niveau, Blandine Pluchet – la pépite – est physicienne de formation… et Edmond Baudoin, le dernier en date, est auteur et dessinateur de bandes dessinées.

Dans Quelques pas hors des cases, Edmond Baudoin nous convie à mettre nos pas dans les siens : dans les rues de Paris, mais aussi sur les sentiers de son enfance à Villars-sur-Var (à une cinquantaine de kilomètres de Nice), le long de la rivière L’Areuse en Suisse, au Canada – où il découvre « l’absence de cercle » et donc l’impossibilité de « faire un tour », au Liban, au Mexique, en Colombie… Il raconte les strates qui s’accumulent au gré des chemins tellement parcourus qu’ils sont peuplés de souvenirs : des pentes grimpées ou dévalées avec les jambes de l’enfance, ces coins reculés où l’amour s’est déployé… Il s’interroge sur le temps qui passe, tant sur soi – on ne marche plus à 80 ans, comme à 40, à 20 ou à 10 ans – mais aussi sur le monde, l’évolution de la société qu’il observe sans nostalgie, mais dont il rend compte avec la responsabilité du témoin. Il parle de la marche plaisir, de la marche effort, de la marche découverte, contemplation… mais également de la marche pour sauver sa vie ou sa terre.

Fantasy/Science-fiction, Littérature francophone, Livre de poche, poche, Romans

« Quitter les monts d’Automne », Emilie Querbalec, Livre de Poche

Tu sais pourquoi j’aime tant ta planète, Kaori ? […]

J’aime Tasai, parce que le Flux n’y a que très peu d’emprise. […] Et la technologie est si peu présente au quotidien que je peux passer des jours sans me lier. J’aime cette sensation de liberté.

Kaori est enfant lorsque ses parents disparaissent dans un incendie. Recueillie par sa grand-mère, Kaori espère elle aussi connaître le Ravissement, l’appel à s’inscrire dans la tradition familiale du « Dit » : l’écriture étant interdite sur Tasai, c’est oralement que se transmet l’histoire de l’humanité. Mais il semble que le destin en ait décidé autrement pour Kaori : elle ne sera pas une conteuse renommée comme sa mère et sa grand-mère. C’est une formation de danseuse que suit la jeune fille.

A la mort de sa grand-mère, Kaori est confiée à une autre famille de conteurs. Elle n’emportera avec elle que très peu de choses, la plus précieuse étant un étrange rouleau calligraphié protégé par un mécanisme ne s’ouvrant qu’à elle. Kaori ne comprend évidemment pas la signification de ce qui est écrit sur ce rouleau et elle prend un risque énorme en le transportant avec elle, mais elle soupçonne aussi qu’il est la clef de son histoire.

Désireuse de percer le mystère qui entoure ce rouleau et sa propre vie, Kaori fera tout pour rejoindre la capitale et y retrouver un Maître croisé dans son enfance. Elle ne se doute pas que ce voyage la mènera bien plus loin encore.

« Quitter les monts d’Automne » a reçu le prix Rosny Aîné 2021 récompensant des œuvres de science-fiction francophones.

Folio, Littérature étrangère, poche, Romans

Mr Wilder et moi, de Jonathan Coe, Folio

Alors qu’elle accompagne l’une de ses filles à l’aéroport, Calista est très émue : difficile de voir son bébé d’une vingtaine d’années quitter l’Angleterre pour la lointaine Australie. Celle-ci lui demande, amusée, si sa propre mère a réagi ainsi lorsqu’au même âge Calista s’est envolée d’Athènes pour un été en solitaire et sac au dos aux Etats-Unis. Cette question suffit à faire resurgir les souvenirs d’une rencontre improbable et déterminante pour l’avenir de Calista : le grand cinéaste Billy Wilder. Rien ne la prédestinait à croiser sa route ni à embrasser une carrière de compositrice de musique de films et, pourtant, cet été a tout changé. A la faveur d’un rendez-vous étrange, d’un bâillement, de coordonnées griffonnées sans espoir d’une nouvelle rencontre et, finalement, d’un coup de fil inattendu l’appelant comme interprète sur le tournage d’un film réalisé par Billy Wilder sur une île grecque, la vie de Calista va basculer.

C’est toujours un plaisir de lire Jonathan Coe, ce le fut encore. A peu près aussi ignorante que Calista en matière de cinéma, j’ai aimé me glisser dans ses pas à la découverte de la personnalité de Billy Wilder, maître du cinéma américain des années ‘50 et ’60. D’origine autrichienne, exilé en 1933, en raison de la montée du nazisme, d’abord en France puis aux Etats-Unis, Billy Wilder sera marqué toute sa vie par l’horreur de la guerre qui lui aura volé sa mère : il ne la reverra plus jamais après son départ. Il est aussi pétri d’Europe, même si sa carrière se déroulera principalement aux Etats-Unis. Les touches d’humour de Jonathan Coe et de Billy Wilder (citations référencées en fin d’ouvrage) agrémentent cette déambulation fascinée de la jeune Calista dans un milieu qu’elle découvre et de de la Calista d’aujourd’hui dans ses souvenirs de jeune femme. Un roman sur le temps qui passe, sur la transition entre générations, sur la capacité ou non de se réinventer et celle d’accepter la fin d’une époque et l’avènement d’un nouveau monde.

Enquête, Les Arènes, Société

Nos pères, nos frères, nos amis. Dans la tête des hommes violents, Mathieu Palain, Les Arènes

« Les violences faites aux femmes, c’est un truc qui t’intéresse ? » C’est à partir de cette question, posée par l’une de ses sources travaillant à la direction de l’administration pénitentiaire, que Mathieu Palain s’engage dans cette enquête sur les raisons qui poussent certains hommes à violenter leur femme. Assistant à des groupes de paroles auxquels des hommes jugés pour violence sont contraints de participer, Mathieu Palain s’attend naïvement à entendre des phrases comme « Bonjour, je m’appelle Mathieu et je frappe ma femme », mais c’est au déni, à l’auto-victimisation de ces hommes qu’il se retrouve confronté, des hommes en perte de repères, estimant que les femmes d’aujourd’hui ont acquis trop de libertés qu’elles ne parviennent pas à gérer, alors qu’eux-mêmes n’ont plus aucun droit. C’est aussi tout un système structuré par la violence dont il prend conscience et met au jour.

De ces témoignages, complétés par des rencontres avec des femmes victimes de violence, des psys et des accompagnants, Mathieu Palain a d’abord réalisé un podcast. Celui-ci a donné lieu à beaucoup de réactions, positives et négatives, à de nouveaux témoignages également : abordant, notamment, les violences perpétrées dans des milieux plus aisés que ceux qu’il avait pu rencontrer dans les groupes de parole.

C’est ainsi que Mathieu Palain poursuivra son enquête au-delà du podcast et décidera d’en faire un livre. Tout comme dans le passionnant Ne t’arrête pas de courir (désormais disponible en poche) consacré à un athlète doué condamné pour des cambriolages à répétitions, Mathieu Palain écrit à la première personne, nous emmenant avec lui dans son enquête, avec ouverture et nuance, mêlant empathie pour les personnes rencontrées et capacité à se (re) mettre lui-même en question, en tant qu’homme et en tant que journaliste. Un livre qui se lit d’une traite.

Actes Sud, Essais, L'échappée, Société

Questions de société : Stefano Boni et David Van Reybrouck

« Je ne crois plus, avec Voltaire, que l’imprudence soit « une sotte vertu ». Nous avons eu tort de supprimer la cheminée au nom du radiateur, d’avoir soldé nos bicyclettes sous prétexte qu’il y avait des autos, d’avoir négligé de faire, à côté de notre compteur à gaz et de notre compteur électrique, des provisions de bougies, voire de chandelles, de charbons divers et de cotrets. L’imprudence, apanage faussement brillant de l’homme, faisait dire au Cardinal qu’imprudence et misère étaient deux termes synonymes. Je pense en frémissant à certains immeubles que j’ai connus, du côté du parc Monceau, où l’on accédait aux étages uniquement par l’ascenseur. Tant de mépris à l’égard du vieil escalier de nos pères conduit tout droit à regretter l’échelle. Nous la regretterons – et ce sera justice. Nous aurions dû ne jamais cesser de nous exercer à nous servir de nos bras, de nos jambes et de notre tête exactement comme s’il devait être fatal, périodiquement, que nous fussions rendus à notre condition primitive d’hommes nus sur une planète sans confort.

Les prudents ont les dieux pour parents.

C’est un proverbe grec.« 

Extrait de la nouvelle « Prudence » dans le recueil Déjeuners de soleil, de Léon-Paul Fargue (1942).

Excellente mise en bouche avant de commencer Homo Confort. Le prix à payer d’une vie sans efforts ni contraintes, de Stefano Boni : un essai intéressant et subversif puisqu’il interroge une notion rarement remise en question, celle du confort, « devenue un idéal absolu ».

Mais que se cache-t-il derrière cette recherche éperdue de confort, de facilité, de moindre effort ? Le confort répond-il à la satisfaction de besoins réels ? Dans une certaine mesure, mais pas ou plus seulement : « Désormais, le confort ne sert plus seulement à satisfaire nos besoins réels, mais constitue le cœur d’une logique économique, sociale et psychologique dans laquelle notre sentiment de bien-être repose sur l’accumulation d’objets pratiques et sur le recours systématique à la technologie. » Par conséquent : « Le confort¨ […] offre une satisfaction qui nous assujettit : il génère des subjectivités plus fragiles politiquement, conséquence de l’individualisme et de la perte d’autonomie. »

De l’asservissement de la nature à la recherche éperdue du bien-être, en passant par la perte de nos savoir-faire et de notre expérience multisensorielle d’être au monde, Stefano Boni nous invite à prendre du recul par rapport à ce confort tant prisé. Comme il l’écrit dans la postface, en répondant aux critiques suscitées par la première édition du livre, son but n’est pas de renier le confort – ou un certain confort –, mais de le conscientiser, de l’interroger, de reprendre la main en se demandant individuellement, mais aussi – et surtout – collectivement ce que nous gagnons et ce que nous perdons au cœur de nos vies confortables. Car s’il nous épargne la fatigue, le confort nous endort. Et est-elle encore désirable, fait-elle encore réellement rêver, cette vie perpétuellement endormie ?

Homo Confort. Le prix à payer d’une vie sans efforts ni contraintes, Stefano Boni, L’échappée.

Autre invitation à nous interroger et à reprendre nos vies en main, la nouvelle publication de David Van Reybrouck : Nous colonisons l’avenir. Préoccupé par les questions écologiques, politiques, démocratiques, David Van Reybrouck émet quatre propositions visant à permettre au citoyen de s’impliquer de manière plus active et directe dans la transition écologique.

Nous colonisons l’avenir, David Van Reybrouck, Actes Sud.

L'Olivier, Littérature étrangère, Romans, Uncategorized

« Matrix », Lauren Groff, Editions de L’Olivier

Elle sort de la forêt seule sur son cheval. Agée de dix-sept ans, dans la froide bruine de mars, Marie, qui vient de France. 

Ainsi commence la légendaire histoire de Marie de France selon Lauren Groff. Légendaire, car on ne connaît rien de la biographie de cette poétesse du Moyen Age : un terrain de jeu idéal pour une romancière. Celle-ci attribue à Marie tous les atours d’un personnage de conte : Marie provient d’une lignée de viragos, des « sauvageonnes qui filaient au grand galop à travers la campagne, montaient scandaleusement à califourchon, s’entraînaient avec leurs maîtres d’armes à l’épée et au poignard, connaissaient huit langues, plus un peu d’arabe et de grec, et tous ces manuscrits poussiéreux, imaginez toutes ces femmes contre-nature professant leurs opinions trop fort, se coupant la parole, argumentant, se battant jusqu’au sang, apprenant à manier la hache d’armes, ces femmes si étranges et si brutales ». Marie est géante (trois têtes de plus qu’une femme « normale »), disgracieuse, le visage chevalin… en un mot, Marie est laide. Cependant, à cette laideur s’ajoutent une volonté de fer, de l’orgueil et de l’ambition, toutes qualités qui lui permettront de devenir une abbesse crainte, respectée et aimée de ses sœurs qui la suivront, malgré de forts désaccords parfois, dans toutes ses entreprises.

Mais reprenons, Marie a dix-sept ans et s’apprête à entrer dans les ordres, contre son gré, mais selon la décision d’Aliénor d’Aquitaine, bien heureuse de se débarrasser de cette bâtarde, en lui dégottant par faveur papale, une place de prieure dans une abbaye royale. « Au moins savait-on à présent quoi faire de cette étrange demi-sœur, bâtarde de sang royal. Au moins, à présent, avait-elle une utilité. » Les commérages vont bon train, certaines ne donnent pas cher de la jeune fille et, pourtant, au fil des ans, Marie trouve sa place dans la communauté, sa rage se mue en amour pour ses sœurs et sa volonté de les protéger et de faire de l’abbaye un refuge de paix en autarcie ne cessera de croître : arrivée en pleine période de malefaim et de pauvreté, Marie laissera une abbaye riche et prospère quelques décennies plus tard.

Récit d’une femme ambitieuse, Matrix est aussi une immersion sensorielle, sensuelle, charnelle : l’écriture de Lauren Groff exhale les odeurs, les matières, le froid, la chaleur, les désirs, le plaisir et la douleur… C’est un plongeon dans une époque où l’être humain était en contact direct avec le monde, sans écran, sans aseptisation. Tout se respire, tout s’éprouve.

C’est aussi un roman d’une grande modernité, un parti pris qui pourrait surprendre ou déranger comme une forme d’anachronisme mais qui n’est l’est peut-être pas tant que ça. En effet, un nouveau courant s’ouvre pour redécouvrir l’histoire des femmes sous un autre prisme, notamment les femmes du Moyen Age.

Ainsi Janina Ramirez nous invite à faire connaissance avec des Femmes remarquables du Moyen Age, sans « réécrire l’histoire », en « utilis[ant] les mêmes faits, chiffres, événements et preuves que ceux auxquels nous avons toujours eu accès, associés aux avancées et découvertes récentes. La différence est [qu’elle] déplace le centre de l’attention ». Expliquant sa démarche : « [t]rouver des femmes du Moyen Age émancipées et dotées d’une capacité d’action est ma façon d’infléchir la réflexion, en proposant de nouveaux récits aux lecteurs d’aujourd’hui. »

Quant aux auteurs de La femme dans la cité au Moyen Age, « ils mettent en exergue le rôle social de la femme médiévale » en « s’appuyant sur des écrits relatifs à la vie quotidienne », « reprenant de nombreuses histoires et anecdotes ».

Grasset, Littérature étrangère, Livre de poche, Romans

A la (re)découverte de Thomas Mann

Le flot permanent de nouvelles publications nous fait parfois oublier ou reporter indéfiniment la lecture de grands classiques de la littérature, surtout quand ceux-ci sont aussi épais et impressionnants que La Montagne magique de Thomas Mann. Dans ce roman, Hans, jeune homme d’une vingtaine d’année, rend visite à son cousin Joachim en cure dans un sanatorium à Davos (Suisse). Alors que Hans a prévu initialement de séjourner trois semaines là-bas, il y restera finalement… sept ans ! En effet, ce lieu étrange frappe quiconque s’y rend d’une forme de langueur, d’atonie, si bien que très vite se dessine une frontière entre les « gens d’en haut » et ceux du « plat pays ». Hans n’échappe pas à cette fascination… et le lecteur non plus, qui en vient à tenter comme le personnage principal de « s’habituer à ne pas s’habituer », vainement. Et il faut bien de la force de caractère pour parvenir à sortir de cette bulle étrange et retrouver la vie d’en bas. Et de la ténacité, mêlée de plaisir et de fierté, pour arriver au bout de ce volumineux « roman du temps ». Si je n’en ai certainement pas saisi toutes les subtilités, j’ai tout de même apprécié cette lecture, aidée par les notes en fin d’ouvrage, la postface éclairante et, non moins importante, la lecture d’un autre roman paru au mois d’août et consacré à Thomas Mann : Le Magicien, de Colm Tóibín.

« Le Magicien », c’est le surnom octroyé par ses proches à Thomas Mann. Dans ce roman, Colm Tóibín retrace le parcours de ce romancier et intellectuel allemand, prix Nobel de littérature en 1929, homosexuel, mariée à Katia d’origine juive. On découvre l’évolution de la pensée et de l’engagement de Thomas Mann qui traversera les deux guerres mondiales et connaîtra l’exil en Suisse, puis aux Etats-Unis, les tourments intimes de cet homme obligé de cacher ses désirs, ses relations parfois houleuses aves ses proches aux positions plus tranchées et virulentes (son frère Heinrich et ses enfants, Klaus et Erika, notamment). Ce roman évoque également la genèse de certains textes, dont évidemment La Montagne magique, inspirée par un séjour au sanatorium de Davos où était soignée sa femme. Et donne des clés de compréhension de l’homme et de l’œuvre. Une bonne entrée en matière !

A noter : il n’est pas nécessaire de connaître déjà Thomas Mann pour apprécier Le Magicien, de Colm Tóibín.

Nadège

Gallmeister, Littérature étrangère, Romans

Astra, Cedar Bowers, Gallmeister

Qui est Astra ? Observez la couverture, elle vous en offre déjà une idée : Astra, c’est une femme multiple, changeante, différente suivant le regard qui se porte sur elle, suivant le moment de vie où nous la découvrons. Car c’est ainsi que se déploie le roman, à travers divers points de vue et épisodes de l’existence d’Astra : de sa naissance – voire sa conception – à sa vieillesse, nous avançons, nous découvrons ce personnage étonnant, insupportable, attachant… Qu’elle subjugue ou qu’elle exaspère, qu’elle attire l’envie de protection ou la jalousie, Astra ne laisse personne indifférent. Enfant indésirée, orpheline de mère (morte en couches), « élevée » par son père, sur un coup de dé, dans une communauté utopiste, Astra pousse comme elle peut, grandit, se débat avec les traumatismes, les aléas, les rencontres bonnes ou mauvaises. Astra est singulière, Astra est universelle, Astra est un être humain qui tente de se trouver et de faire sa place.

J’ai trouvé ce roman très touchant et j’ai beaucoup aimé cette construction en fragments, ces scènes de vie que l’on prend en cours, que l’on quitte sans connaître tout à fait la suite, et l’évolution non seulement de ce personnage, Astra, mais aussi de ceux qui croisent sa route. Cedar Bowers nous montre à quel point nous sommes des êtres complexes : bien présomptueux sommes-nous de penser connaître ceux qui nous entourent. On sort de cette lecture avec l’envie de se montrer plus indulgents et bienveillants, envers nos amis, nos parents, nous-mêmes.

Nadège

Littérature francophone, Zoé

« Tortues », de Bruno Pellegrino, Editions Zoé

D’où vient cette peur enfantine d’un incendie qui ravagerait la maison, détruirait les objets, les carnets, ce qui constitue une vie, si jeune soit-elle ? Mystère. Bruno Pellegrino « ne sai[t] pas d’où vient cette inquiétude. L’enfant n’a pas connu d’arrachement, cette chambre est la sienne depuis toujours. Mais si cela devait arriver, s’il fallait partir, il veut être prêt. Il range dans le dernier tiroir de son bureau ses biens les plus précieux […] La nuit où la maison brûlera, lorsque sa mère viendra le chercher et lui dira de sortir, vite, vite, il n’aura qu’à emporter le tiroir avant de quitter la chambre. » Chaque dimanche, le rituel se répète : trier, jeter, conserver.

Plus tard, la question se pose de savoir que garder de la vie des autres : cette écrivaine décédée dont il est chargé d’inventorier les documents ; Marthe, la poétesse inconnue qu’il recherche avec minutie ; Françoise, l’héritière du poète suisse Gustave Roud, qui elle-même entretient fidèlement la mémoire du grand homme en classant ses photos, en prenant soin de sa maison. Trier, conserver, jeter, exhumer et entretenir la mémoire, rendre vie en sortant de l’oubli, préserver ces petits riens qui font une vie, traquer la mention d’un nom dans une nécrologie, s’interroger : que signifie archiver ? Tout conserver ou sélectionner ? Et si l’on sélectionne, est-ce encore faire œuvre de mémoire ou plutôt œuvre d’oubli ? « si fabriquer des archives consiste à en détruire la pus grande partie, alors l’archive n’est pas un moyen de garder la mémoire, mais une méthode pour apprendre à oublier »

Et puis, que signifie oublier, se souvenir ? Qu’est-ce que la mémoire ? Comment fonctionne-t-elle ? Existe-t-elle seulement ? Ainsi que nos souvenirs ? Ou ne sont-ils qu’une fiction, des images qui « s’altère[nt] », que l’on reconstruit, dont on se persuade ?

Tortues constitue l’autoportrait d’un auteur en une mosaïque de souvenirs, d’enquêtes sur soi et sur d’autres, un recueil à la fois personnel et universel, où l’on retrouve la patte poétique reconnaissable de Bruno Pellegrino, déjà appréciée dans son roman Là-bas, août est un mois d’automne.

Nadège

Paresse pour tous, Hadrien Klent, éd. Le Tripode

Voici la dernière lecture commune de notre Club de lecture et autant dire que l’enthousiasme était au-rendez-vous pour ce livre iconoclaste. Sous la forme d’un roman, l’auteur nous propose une réflexion sur le travail et le temps qu’on y consacre tout au long de notre vie. Son personnage principal, Emilien Long, est un prix Nobel…

Une partie de nos lectures du mois de janvier

La vie heureuse, David Foenkinos, éd. Gallimard : Que diriez-vous de mourir pour mieux vivre ? Dans son dernier roman, Foenkinos explore le concept du frisson de la mort commercialisée à Séoul. Une histoire optimiste, touchante et drôle, explorant des sujets de société actuels tout en interrogeant sur le sens de la vie. Un monde…

Lisez-vous le belge ?

Pendant tout le mois de novembre, les librairies et les bibliothèques mettent en avant les auteurs et les éditeurs belges. A la librairie, vous le savez, c’est tout au long de l’année que nous mettons les auteurs belges en avant. Nous avons reçu Michel Lambert fin septembre, Monsieur Nicolas pour les fêtes de Wallonie de…

Gallimard, J'ai lu

Les derniers jours de Stefan Zweig de Laurent Seksik.

Le 22 février 1942, exilé à Pétropolis, Stefan Zweig met fin à ses jours avec sa femme, Lotte. Le geste désespéré du grand humaniste n’a cessé, depuis, de fasciner et d’émouvoir. Mêlant le réel et la fiction, ce roman restitue les six derniers mois d’une vie, de la nostalgie des fastes de Vienne à l’appel des ténèbres. Après la fuite d’Autriche, après l’Angleterre et les États-Unis, le couple croit fouler au Brésil une terre d’avenir. Mais l’épouvante de la guerre emportera les deux êtres dans la tourmente – Lotte, éprise jusqu’au sacrifice ultime, et Zweig, inconsolable témoin, vagabond de l’absolu.

Grand auteur ayant marqué son époque, Stefan Zweig est dépeint ici par Laurent Seksik qui, avec une grande justesse et sensibilité, raconte, de manière « romancée », les 180 derniers jours de l’écrivain ainsi que de sa femme, Lotte. Cet exil précipité, les éloignant de la guerre, les ont approchés de la mort. Zweig est décrit comme torturé, dans une errance constante, l’homme qui avait tout, devint l’ombre de lui-même. Se sentant comme un paria, un lâche, un vagabond… l’homme qui avait tant écrit n’écrivait plus. Lotte, sa femme, sentant l’homme qu’elle admirait, qu’elle aimait, glisser dans la noirceur de ses idées, glissera avec lui dans ce chemin malheureux.

La fin, on la connait. Le 22 février 1942, dans leur maison à Pétropolis, ils se suicidèrent tous les deux. Lotte, qui n’a pas suffisamment été regardée par l’homme qu’elle aimait au cours de leur exil, souhaitera l’accompagner dans son dernier voyage, afin d’exister au moins une fois à ses yeux. L’ultime geste d’amour.

« Nous avons décidé, unis dans l’amour de ne pas nous quitter. » C’est ce qu’écrira Stefan Sweig, dans son dernier livre « Le monde d’hier – Souvenirs d’un européen », envoyé deux jours avant sa mort.

Laurent Seksik nous plonge dans l’univers intime d’un homme en fin de vie, le portrait réussi d’un couple bousculé par l’Histoire.

Leeloo

Le nouveau roman de Laurent Seksik (Janvier 2023) « Franz Kafka ne veut pas mourir » vient de paraitre aux éditions Gallimard : https://www.librel.be/livre/9782073015068-franz-kafka-ne-veut-pas-mourir-laurent-seksik/

Grasset, Littérature étrangère, Romans

Vers le paradis, Hanya Yanaghiara, Grasset

Paru début septembre, Vers le paradis, impressionnant roman – tant en volume, qu’en qualité – de Hanya Yanaghiara méritait d’attendre une période plus propice afin de le savourer. C’est donc début janvier que j’ai entamé cette lecture. Durant trois semaines, je me suis immergée dans ce(s) formidable(s) livre(s) et j’en suis sortie fascinée par le talent de cette talentueuse autrice.

Si j’écris « livres » au pluriel, c’est que ce roman est en réalité constitué de trois parties intitulées respectivement « LIVRE I », « LIVRE II » et « LIVRE III ». Juste appellation puisque chacune de ces parties nous conte une histoire distincte et pourtant le tout forme un ensemble, un roman. Ce qui relie ces trois « livres », c’est – entre autres – une maison sise Washington Square à New York.

Le premier livre se déroule en 1893. Le récit débute par un dîner dominical dans une famille de le haute société new yorkaise. Ce dîner réunit Nathaniel Bingham et ses trois petits-enfants adultes. Deux d’entre eux sont mariés ; le dernier, David, âgé de 29 ans, est toujours célibataire. A la fin du repas, Nathaniel invite David à le rejoindre dans son bureau pour parler mariage. Début classique, penserez-vous. Pourtant, un détail nous fait basculer dans une autre réalité : dans ce New York du XIXe siècle imaginé par Hanya Yanaghiara, chacun(e) se marie avec qui il ou elle le souhaite, sans jugement d’orientation sexuelle. C’est donc la proposition d’un prétendant que Nathaniel soumet à son petit-fils. David est libre d’accepter ou de refuser… libre aussi de se marier ou non… libre d’aimer là où on son cœur le porte, en théorie. Mais vivre dans un Etat libre suffit-il à l’être vraiment ?

Le deuxième livre s’ouvre cent ans plus tard : 1993, années sida. Un jeune homme originaire d’Hawaï partage la vie d’un homme de trente ans son aîné. Différence d’âges, différence d’origines, différence de classes aussi. Si ce jeune homme n’a que peu de consistance et d’importance aux yeux des amis de son compagnon, il cache un vécu beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît.

Enfin, le troisième livre, le plus conséquent – la moitié du roman – nous propulse dans un New York de 2093 régit par un gouvernement totalitaire, les libertés individuelles sont de l’histoire ancienne, tellement révolue que peu s’en souviennent. Les épidémies se sont multipliées, le réchauffement climatique s’est intensifié, les rapports humains se sont totalement délités. La narratrice s’interroge sur les activités de son mari après avoir découvert de petits mots dans une boîte. En alternance à son récit, un autre narrateur s’exprime à travers une correspondance écrite des décennies auparavant. Progressivement les récits se rejoignent pour nous dévoiler comment le monde s’est désagrégé en si peu de temps.

Jusqu’au bout Hanya Yanghiara maîtrise son (ses) récit(s). Vers le paradis est un roman d’une grande intelligence, une analyse fine de la société, des comportements humains, des dérives déjà à l’œuvre et de leurs possibles conséquences. C’est un roman qui déstabilise son lecteur en bousculant ses attentes, qui pose sans doute plus de questions qu’il n’apporte de réponses, un grand roman à découvrir.

Nadège

Fantasy/Science-fiction, J'ai lu, Littérature étrangère, poche

Le prieuré de l’oranger de Samantha Shannon.

Un monde divisé.
Un reinaume sans héritière.
Un ancien ennemi s’éveille.
La maison Berethnet règne sur l’Inys depuis près de mille ans. La reine Sabran IX qui rechigne à se marier doit absolument donner naissance à une héritière pour protéger son reinaume de la destruction, mais des assassins se rapprochent d’elle…
Ead Duryan est une marginale à la cour. Servante de la reine en apparence, elle appartient à une société secrète de mages. Sa mission est de protéger Sabran à tout prix, même si l’usage d’une magie interdite s’impose pour cela.
De l’autre côté de l’Abysse, Tané s’est entraînée toute sa vie pour devenir une dragonnière et chevaucher les plus impressionnantes créatures que le monde ait connues. Elle va cependant devoir faire un choix qui pourrait bouleverser son existence.
Pendant que l’Est et l’Ouest continuent de se diviser un peu plus chaque jour, les sombres forces du chaos s’éveillent d’un long sommeil… Bientôt, l’humanité devra s’unir si elle veut survivre à la plus grande des menaces.

Sorti en 2019, «Le prieuré de l’oranger» s’est très vite installé comme étant l’une des nouvelles pépites de la littérature fantasy. Avec ces plus de 1000 pages, Samantha Shannon, considérée comme la « nouvelle Robin Hobb », nous plonge dans un univers médiéval et mystique, où Est et Ouest se divise un peu plus chaque jour, notamment, à cause de la peste draconique, maladie contagieuse et dangereuse venue de l’Ouest. Et à l’inverse, où Orientaux sont considérés comme hérétiques par rapport à leur proximité avec les dragons. Au Sud, Le prieuré de l’Oranger, qui n’a pratiquement aucun contact avec l’extérieur, est une sororité de femmes formées à la magie et au combat.

Le récit suit plusieurs personnages importants de l’histoire, du côté des deux frontières, ce qui permet aux lecteurs de rapidement s’orienter géographiquement. A l’Est, Sabran, la Reine d’Inys et  Ead Duryan, sa dame de chambre. A l’Ouest, Tané, dragonnière en devenir, ainsi que le docteur Niclays Roos.

Ce roman féministe assumé  où principaux rôles et postes de pouvoir sont pourvus par des femmes, l’auteur arrive, sans militantisme, à leur donner une belle place.  

Quant à l’univers, rien n’est laissé au hasard, culturellement inspirés de différentes régions de notre monde, il est riche en traditions, ce qui en fait une belle peinture de fond, le tout en un tome seulement.

Même si l’intrigue est assez classique, s’unir pour affronter le mal, c’est une lecture divertissante où des thématiques actuelles sont transposées dans un univers riche aux personnages attachants.

Disponible en grand format chez De Saxus : https://www.librel.be/livre/9782378760373-le-prieure-de-l-oranger-samantha-shannon/

Mais également en poche, en deux parties, chez J’ai Lu : https://www.librel.be/livre/9782290253175-le-prieure-de-l-oranger-partie-1-samantha-shannon/

En Mars 2023, découvrez le préquel du Prieuré de l’Oranger , « Un jour de nuit tombée » aux éditions De Saxus.

Leeloo.

Bande dessinée, Casterman, Dargaud

Les BD que nous avons lues et que nous avons aimées.

« Un roman graphique touchant dans lequel Mayana Itoïz rend hommage à sa grand-mère. »

Les petits morceaux sont ceux d’une photo, déchirée, par Pierre, le mari de Léo. Durant la seconde guerre mondiale, Léo travaille dans l’auberge familiale réquisitionnée par l’occupant. Elle vit secrètement une histoire d’amour avec une jeune soldat allemand, Félix. Le temps est passé…devenue mère, puis grand-mère, c’est à la fin de ses jours qu’elle révèlera l’histoire de son passé.

« Jean Claude Servais revient à ses premiers amours, les contes ruraux des Ardennes. « 

Au 18e siècle, le petit Bellem et sa mystérieuse mère se rendent au château de Reinhardstein, où l’enfant remet une lettre au Marquis de Vauban. Celle-ci révèle qu’il est le fils de la fée Mélusine. Recueilli par le maquis dont la fortune doit sa fortune à la fée, Bellem suivra une éducation religieuse, en compagnie de Marie-Charlotte la jeune comtesse. L’enfant fait preuve d’une cruauté très inventive, d’un don pour les farces inspirées et d’un goût pour la liberté qui va le jeter droit sur les chemins de la découverte de lui-même, au gré d’aventures pleines de magie, d’amour et de drame..

« Hoka Hey ! est un merveilleux hommage au western américain. »

Elevé de force par le pasteur qui administre sa réserve, Georges est un jeune Lakota oubliant peu à peu ses racines et rêvant d’un monde inspiré du modèle américain. Il va croiser la route de Little Knife, un amérindien cherchant à retrouver le meurtrier de sa mère, ainsi que de deux acolytes. Poursuivi par les autorités, une longue quête les attende, où transmission culturelle et partage sont au coeur du récit.

« A l’heure où préoccupations écologiques et aspirations à la décroissance génèrent de nombreuses vocations de néo-ruraux, Le Collectif apporte un témoignage joyeux et plein d’optimisme de ce choix de vie pas si utopique. »

Tout plaquer pour partir vivre au vert et vivre dans un mode de vie plus solidaire…c’est le défi que Mich et Julie se sont lancés en créant un collectif avec des jeunes venant d’arriver dans leur hameau. Tout est à faire, potager, jardin, répartition des récoltes,… La richesse du groupe basé d’abord sur les différences deviennent un problème.

« Les héros pensionnés manifestent contre le néocapitalisme dans la septième fournée des Vieux Fourneaux. »

A Montcoeur, la fête bat son plein en ce premier Mai, où le maire a organisé un pique-nique de l’amitié. Soudain, celui-ci est victime d’une agression à l’arme blanche. On y apprend aussi la mort de d’Armand Garan-Servier, le patron de l’entreprise qui porte son nom. À son décès s’ajoutent d’ailleurs plusieurs incendies inexpliqués qui ne font qu’attiser les tensions déjà palpables dans le village.

Loin de là, à Paris, Antoine participe à la manifestation du 1er mai, où il s’oppose à la violence d’un militant des « black blocs », avant de se retrouver à l’hôpital après une charge policière musclée.

Et encore…

« La philosophie à la portée de tous, une belle adaptation du célèbre roman philosophique de l’écrivain norvégien Jostein Gaarder »

« Qui es-tu ? », « D’où vient le monde ? »,..Sophie reçoit d’intrigantes questions par lettre. La jeune fille est propulsée dans une aventure où elle découvre les principales figures de la philosophie occidentale, et surtout elle-même !

« Avec le sixième tome de « L’Arabe du futur », consacré aux années 1994-2011, Riad Sattouf achève merveilleusement sa série autobiographique. »

Racontant l’enfance et l’adolescence de l’auteur, fils aîné d’une mère française et d’un père syrien. L’histoire nous mène de la Libye du colonel Kadhafi à la Syrie d’Hafez Al-Assad en passant par la Bretagne, de Rennes au cap Fréhel.
Ce sixième tome couvre les années 1994-2011.
C’est le dernier de la série culte de Riad Sattouf, vendue à plus de 3 millions d’exemplaires et traduites dans 23 langues.

« Blake et Mortimer restent immortels et incontournables dans le paysage d’une bande dessinée classique et inventive. »

Printemps 1963. Dans l’Oural, au coeur de l’Empire soviétique, une mission archéologique découvre sept cercueils dont les cadavres ont la peau du visage arrachée. Au même moment, à Berlin, un homme se fait tirer dessus alors qu’il franchit le Mur coupant la ville en deux. Avant de succomber, il réussit à prononcer un mot étrange : Doppelgänger. A priori, aucun rapport entre ces deux événements. Mais en réalité, il existe bien un lien entre la macabre découverte et le transfuge abattu: Julius Kranz, un chirurgien est-allemand spécialiste des manipulations électro-chirurgicales sur le cerveau humain. Blake et Mortimer vont croiser la route de ce scientifique machiavélique qui prépare la plus grande mystification de l’histoire de l’humanité…

« Une passionnante quête de vérités au coeur des vignes. »

Pas de repos pour Alexandra Baudricourt dont le domaine viticole risque toujours la faillite. Séparée de son mari, elle est bien décidée à trouver les moyens nécessaires pour garantir l’indépendance de sa propriété et faire évoluer ses méthodes de production. Acculée, trompée, elle va très progressivement remonter la piste de ceux qui veulent lui faire du tort et faire éclater la vérité sur l’accident qui a coûté la vie de son chef de culture.
Le dernier épisode de la saison 2 de Châteaux Bordeaux nous entraîne au cœur d’une industrie en pleine mutation, où tous les coups sont permis.

Prison de Boniato, au nord de Santiago de Cuba. Dans une cellule, un homme cherche à sauver sa peau. Il implore le directeur d’envoyer un mail à un certain Boris Denisov, un Russe qui pourrait le sortir de cet enfer. A Washington, Jason Mac Lane, alias XIII, est devenu conseiller spécial à la sécurité. Depuis que la Fondation Mayflower, un mouvement d’extrême-droite a reprogrammé sa mémoire, il a tout oublié de son passé. Désormais dévoué à Mayflower, il ignore que ses lunettes, munies d’une caméra, révèlent tous ses faits et gestes à Janet, son épouse, membre éminent de l’organisation. Jason s’apprête justement à s’envoler pour Cuba afin de récupérer le prisonnier. Car le mail a été intercepté : le dénommé Tadine, un hacker de premier ordre, pourrait contribuer à la réélection d’Allerton. Problème, c’est que Boris Denisov s’intéresse lui aussi à Tades. Et que le président Allerton, qui se méfie des ambitions de Janet, ne verrait pas d’un mauvais oeil la disparition de Jason…

« Avec Sabbath Grand Derby, Arthur de Pins met un point final à Zombillénium. »

Le parc d’attractions Zombillénium garde toujours prisonniers des dizaines de visiteurs. Il est convoité par de nombreux démons, chacun désireux d’en devenir actionnaire majoritaire. Seule méthode d’arbitrage acceptée de tous : le Sabbath Grand Derby, épreuve sportive aussi violente qu’inventive où s’affrontent cinq sorcières auxquelles vont être donnés en pâture les visiteurs du parc. Parmi les candidates, Gretchen, tente le tout pour le tout. Les spectateurs du Sabbath Grand Derby, retransmis comme un banal programme de téléréalité, vont en prendre plein les yeux !

« José Luis Munuera adapte librement : Un chant de Noël, de Charles Dickens, un classique de la littérature anglo-saxonne. »

Londres, 1843. Tous les habitants, les mieux lotis comme les plus démunis, s’apprêtent à fêter Noël, à l’exception de Scrooge. Aux yeux de cette riche commerçante, seuls le travail et l’argent ont de l’importance. Une nuit, des esprits viennent lui rendre visite. Ils l’emmènent avec eux, à la rencontre de la jeune fille qu’elle était, quelques années plus tôt, lorsque la cupidité n’avait pas encore rongé son coeur.

« Le bonheur, c’est comme un jardin, ça se cultive ! »

Margaux sent que son couple vacille. Après sa dernière dispute très orageuse avec Pacco, elle déploie des trésors d’amour et d’attention, mais, tel un ours, il boude et poursuit sa vie dans son coin. Et si Margaux trouve enfin l’idée qui pourrait les réconcilier, les deux amoureux peinent à relever le défi. Margaux décide alors de se recentrer sur elle-même, afin de mieux comprendre les sentiments mélangés qui la divisent.

Arléa, auteur belge, Espeluète, Inculte, La contre-Allée, littérature belge, Philippe Rey, Prix Rossel, Romans

La sélection du Prix Rossel 2022 est connue

Parmi les livres repris, j’en ai lu deux que j’ai beaucoup aimés.

Le premier lu est « Sauvage est celui qui se sauve » de Veronika Mabardi, édité par les éditions Esperluète.

C’est un très beau texte dans lequel l’autrice évoque son frère décédé. Celui-ci, d’origine coréenne, avait été adopté par la famille Mabardi et avait presque le même âge qu’elle. C’est un récit beau, touchant, poétique qui rend hommage à ce frère trop tôt disparu, artiste en devenir tourmenté par son déracinement et qui n’a pas su s’apaiser.

Le livre est accompagné de dessins de ce frère aimé qui a laissé une trace indélébile dans la vie de Veronika Mabardi.

Le livre est disponible à la librairie au prix de 19€.

Le deuxième livre de la sélection que j’ai lu et beaucoup apprécié est « L’engravement » d’Eva Kavian publié aux éditions La Contre-Allée.

Ils sont là sur le chemin, ces parents, solitaires, en couple, en famille ou pas. C’est le jour des visites, celui ou, malgré la foule, on se sent seul pour aller rendre visite à cet enfant enfermé en hôpital psychiatrique. Chacun y va avec son vécu, sa petite voix intérieure qui relate son humeur, son amour, sa tristesse ou peut-être sa joie parce que c’est le jour de sortie. Eva Kavian fait parler ses personnages de très belle manière et emmène son lecteur à sa suite dans des émotions fortes. Chaque petit chapitre est entrecoupé d’un court texte, voix de aseptisée masquant les émotions.

Ce roman m’a bouleversée, je n’avais qu’une envie en le refermant, c’était de le relire et de le partager avec vous, lecteurs. C’est pourquoi, j’ai invité Eva Kavian a venir nous parler de son travail d’écriture.

La rencontre avec Eva Kavian aura lieu le mercredi 16 novembre à 19h30 à la librairie.

N’hésitez pas à vous inscrire au 081/600.346 ou à librairieantigone@skynet.be

Les autres livres sélectionnés sont

L’apparence du vivant de Charlotte Bourlard publié aux éditions Inculte

Ainsi pleurent nos hommes de Dominique Celis publié aux éditions Philippe Rey

L’apocalypse heureuse de Stéphane Lambert publié chez Arléa

Club de lecture, Plon, Rentrée littéraire, Romans

Rentrée littéraire – Club de lecture – Valse fauve – Pénélope Rose – Plon

Lecture de Christine

Histoire de Rose, femme mariée à la sauvette à Mr André. André reste secret sur sa vie et ramène un jour une fillette très jeune qu’ils appelleront Michèle.

Très vite, André s’engage dans la résistance (guerre 40-44) et laisse Rose et Michèle à leur triste sort : narration dure mais très réaliste de la vie du quotidien des différents habitants du village sous la domination des « Salauds » et description de ce quotidien où chacun vit sa guerre différemment : « Nous n’avions plus les mêmes ennemis, nous ne vivions plus la même guerre. Ni lui, ni moi, ni les autres voisins, ni personne » (p.141)

Chaque début ou fin de chapitre reprend des lettres envoyées par ces résistants ou par Rose à son André.

Cette femme tient grâce à la composition de listes d’activités à réaliser : « cela a été un soulagement. Poser le crayon sur un bout de papier, y déposer des mots qui devenaient quelque chose à bâtir. Le crayon telle qu’une baguette de sorcier faisait apparaître sur la feuille un avenir agréable » (p.88)

Ce livre décrit la force de ces personnes qui subissent cette guerre. Il est jalonné de divers rebondissements et qui obligent le lecteur à lire l’entièreté pour comprendre enfin l’introduction.

Personnellement, je suis restée accrochée à ce livre et à cette histoire.

Club de lecture, L'iconoclaste, Rentrée littéraire, Romans

Rentrée littéraire – Club de lecture – Tibi la Blanche – Hadrien Bels – L’Iconoclaste

Trois adolescents en dernière année du Lycée à Dakar racontent leur quotidien. Venant de familles diamétralement différentes, ils expliquent leur façon de vivre le quotidien mais surtout leur façon de considérer le Blanc, les cousins qui vivent en France et ceux qui ont le pouvoir en tant qu’africain dans leur pays ou en France.

Tibilé est l’héroïne de ce livre, « elle résiste à tout, elle est dans une résistance silencieuse »  et nous permet de voir le contraste entre l’éducation très traditionnelle de sa mère et celle de son père.

Pour sa mère :  « les Soninkées ne se marient pas avec les Diola. Les traditions déteignent trop dans les bassines du mariage … Elle dira « oui » à un garçon, oui à sa mère, elle veut rester dans le bain chaud familial … elle jouera le jeu qu’on attend d’elle » (p.123) et celle de son père. Ce dernier a fait la Sorbonne, vend des produits venant d’Europe et souhaite que sa fille fasse des études et qu’elle aille faire ce qu’elle veut en France. Leur maison est ouverte à qui veut : « chez les Kanté, les pas de porte sont des parkings de claquettes que tu peux emprunter comme des voitures de location. » (p.55)

Isaa est un ado peul, ancré dans les quartiers pauvres de Dakar. Pour y être allé, l’auteur décrit vraiment l’ambiance de ces quartiers et la débrouille de ces jeunes. Isaa est styliste et gagne sa vie en cousant les vêtements pour les mariages, cérémonies. Il veut son bac pour faire un BTS stylisme.

Neurone est issu d’une famille sénégalaise qui a réussi : père a une grande usine inter-export de voitures venant de partout, riche et très en retrait par rapport au quotidien de Tibilé et Isaa. Son père ne souhaite qu’une chose, c’est qu’il aille faire ses études à Paris « La France va ouvrir à son fils ses bras flasques de vieille blanche et elle ne la lâchera plus. »(p.34)

Neurone apprécie être avec ses amis car ils lui ouvrent une autre façon de vivre le quotidien et la vie au Sénégal.
Livre montrant l’impact du colonialisme, le vécu des familles qui vont en France et qui renient leur pays d’origine.

Beaucoup d’expressions assez suaves à mes yeux : pour parler de la chaleur et de la nuit qui vient : « la lune est couverte d’une couette sombre et la nuit retient ses larmes. » (p.88)

 pour parler des fous sortant d’un asile, l’auteur écrit « on les retrouve dans le quartier, comme des cerfs-volants sans ficelle. » (p.61)    

Club de lecture, L'Olivier, Rentrée littéraire, Romans

Rentrée littéraire – Club de lecture – Tenir sa langue – Polina Panassenko –Editions de l’Olivier

Lecture de Laurence J. (et coup de cœur de Laurence Merveille !)

Le livre (roman, récit ?) commence alors que Pauline à l’état civil tente de récupérer
son prénom de naissance, Polina, que l’administration a remplacé par son équivalent
français. Cela s’est passé sans qu’elle s’en rende vraiment compte, les documents
étaient plutôt équivoques, elle croyait pouvoir utiliser l’un ou l’autre.


En fait, le livre alterne chapitres récents, relatifs à la procédure légale (rendez-vous
au tribunal, échanges avec l’avocate), et souvenirs d’enfance, entre la Russie natale et
la France d’accueil. Polina est née à Moscou. Le début de sa vie, elle le passe dans l’appartement communautaire qu’elle occupe avec ses parents, sa sœur et ses grands-
parents. Au lendemain de la chute de l’URSS (les chars dans les rues, Boris Eltsine, tout ça tout ça), ses parents décident de quitter le pays pour la France (dans la région
de Saint-Etienne). Polina a quatre ou cinq ans, on ne lui explique pas vraiment ce qui
se passe ou elle ne le comprend pas, donc elle va s’intégrer à la dure.


Il semble qu’elle ait gardé des souvenirs très clairs de son apprentissage du français
(souvent cocasses ou émouvants), mais aussi des stratégies mises en œuvre par sa
mère pour lui permettre de (re)tenir sa langue maternelle. Polina retourne tous les
étés en Russie, dans la datcha des grands-parents. Là-bas, elle ne doit pas dire qu’elle
vit en France, car sa famille craint un enlèvement. Par le biais d’un cas très personnel,
on touche donc à ce que cela signifie d’être biculturel, et comment cette double
culture s’acquiert et s’installe.


C’est tantôt drôle, tantôt touchant, toujours juste. La langue est moderne et bien
maîtrisée. Certains (courts) passages sont en russe, sans que la traduction soit
indiquée (par un astérisque), mais la signification apparaît dans le texte-même. C’est
le seul élément qui pourrait déranger certains lecteurs. Très chouette découverte.

Albin Michel, Club de lecture, Littérature étrangère, Rentrée littéraire, Romans

Rentrée littéraire – Club de lecture – Arpenter la nuit – Leila Mottley – Albin Michel

Lecture de Laurence J.

Je dois bien dire qu’après les premiers chapitres, une désagréable impression de déjà-lu m’a prise. Une jeune fille noire dans un quartier défavorisé, père mort, mère en
prison, frère irresponsable, c’est dur et très malheureux mais bon, on connaît, elle
tombe dans la prostitution, va-t-elle s’en sortir ?


Heureusement, plus loin, l’histoire se fait plus originale, et j’ai réussi à véritablement
accrocher au roman. Car si Kiara tombe dans la prostitution un peu par hasard et
bien malgré elle, elle y reste par calcul pour payer le loyer et s’occuper de son petit
voisin (leur relation illumine le roman). Et elle va devenir la prostituée de référence
d’un commissariat ; on l’appelle pour les pots de départ et les soirées poker entre
flics. Comme elle est encore mineure, il va y avoir des pépins. Il lui faudra bien du
courage pour dénoncer ce dont elle est victime.


Cette Kiara de fiction, qui est la narratrice du livre, prend vraiment chair sous nos
yeux de lecteur, car elle est complexe, à la fois dure et tendre, fragile mais capable de
tout pour survivre et surtout généreuse envers ceux qu’elle aime. On est sans cesse
au plus près de ses pensées et de son vécu. La plume de Leila Mottley est plutôt
poétique.


Ce qui est le plus remarquable, c’est que ce roman (un peu longuet parfois) a été écrit
par une gamine de 17 ans et qu’il ne s’agit pas d’une autobiographie déguisée. C’est
un fait divers survenu dans sa ville, East Oakland (de l’autre côté de la baie de San
Francisco), qui est à la base de cette histoire, mais tout le reste est fictionnel. Très
prometteur.

Club de lecture, Grasset, Rentrée littéraire, Romans

Rentrée littéraire – Stardust – Léonora Miano – Grasset

Lecture de Christine

Ce livre raconte assez crûment le quotidien de Louise, femme camerounaise, arrivée à Paris, avec son bébé Bliss, né en France. Cette femme séparée volontairement de son mari, atterrit pour éviter les hôtels miteux du 19ème arrondissement, dans un centre d’hébergement et de réinsertion sociale de Crimée à Paris. Elle nous raconte en phrases courtes, la réalité dans ce centre. Elle dépeint la réalité de quelques femmes présentes dans ce centre et explique la difficulté d’être dans ce statut de paria de la société française. Récit palpitant, assez dur sur la réalité humaine. L’autrice cherche à nous faire réfléchir sur notre façon de considérer l’Autre qui se retrouve dans une difficulté majeure de vie mais elle nous montre aussi les relations qui peuvent s’installer entre humaines quand la dignité est mise à mal.

Club de lecture, Littérature étrangère, Métailié, Rentrée littéraire, Romans

Rentrée littéraire – Club de lecture – Le Lâche – Jarred McGinnis – Métailié

Lecture de Laurence J.

Très agréable mais terrible lecture que le roman du destin brisé de Jarred. Avant
l’accident de voiture qui ouvre le livre et durant lequel il perd l’usage de ses jambes,
la vie de Jarred était déjà mal embarquée. Cela, on va le découvrir petit à petit.


Après le minimum de soins à l’hôpital (eh oui, aux Etats-Unis, on ne va pas loin sans
assurance), Jarred est plus ou moins mis à la porte. Il n’a personne à appeler, à part
son père. Problème, depuis que Jarred a fugué à l’âge de 16 ans (soit 10 ans
auparavant), ils ne se sont pas revus, ni même reparlé. Le père vient, l’accueille à la
maison, et l’histoire peut commencer. C’est l’apprentissage de la vie en fauteuil pour
Jarred (avec de temps en temps des scènes d’anthologie) et la possibilité (ou pas)
d’une réconciliation et d’une reconstruction.


Le récit alterne les chapitres sur la vie actuelle des deux hommes et ceux sur leur
passé. On n’apprend donc que progressivement les tenants et aboutissants de leur
relation et de leur brouille, ainsi que les circonstances de l’accident.


Les situations sont finement observées (on sent que l’auteur est passé par là, les
scènes présentant le regard des autres sur le handicap et les réactions du chaisard sont
très intéressantes), les personnages sont revenus de tout, écorchés, parfois désespérés
mais avec suffisamment d’humour (parfois grinçant) pour nous éviter le marasme.


Jusqu’à la fin, on ne sait pas si la situation va se stabiliser ou éclater, ce qui est pour
moi une des qualités du livre. J’ai ri, j’ai été émue, ce livre a vraiment touché une
corde sensible.

Ecole des loisirs, littérature jeunesse et adolescents, Romans

Mémoires de la forêt – Les Souvenirs de Ferdinand Taupe, Mickaël Brun-Arnaud, Ecole des Loisirs

Il est des pépites qu’on aimerait offrir autour de soi dès les premières lignes et qui nous habitent des jours après la lecture. Mémoires de la forêt. Les souvenirs de Ferdinand Taupe en fait partie. Dès la couverture, nous voici invités en douceur dans cette belle histoire : celle d’Archibald Renard et de Ferdinand Taupe, à la recherche de l’énigmatique Maude.

Archibald Renard est le libraire du village de Bellécorce. Dans sa librairie, chaque animal peut apporter ses écrits et espérer qu’ils soient vendus. Un jour, Ferdinand Taupe, un très vieux et très ancien client, arrive très agité : il recherche ses mémoires qu’il a déposés des années auparavant. Malheureusement ce livre vient d’être vendu et Archibald n’a pas noté le nom du client.

Ferdinand Taupe souffre de la maladie de l’Oublie-Tout et a besoin de son livre pour retrouver ses souvenirs, particulièrement ce qu’est devenue Maude (mais qui est Maude ?). Il ne dispose que de quelques photos et c’est avec ces maigres indices que le libraire va accompagner la taupe sur les traces de ses souvenirs.

Mickaël Brun-Arnaud signe un premier roman tendre et touchant, traitant avec beaucoup de délicatesse de la maladie d’Alzheimer. Diplômé en psychologie, l’auteur connait son sujet : il a travaillé pendant dix ans dans l’accompagnement de personnes souffrant de cette maladie. C’est aussi une magnifique histoire d’amitié et d’apprentissage, rehaussée des très belles illustrations de Sanoe.

 A mettre entre toutes les mains, des enfants – entre 9 et 12 ans – aux plus grands.

Nadège

Littérature étrangère, Romans, Seuil

Au large, Benjamin Myers, Seuil

Le sentimental, vois-tu, ne se résume pas à deux cœurs qui saignent et à des roses rouges. Le sentimental, c’est l’émotion, la liberté. C’est l’aventure, la nature et l’appel de l’ailleurs. Le fracas de la mer et de la pluie sur la toile de ta tente et une buse qui plane sur la prairie, se réveiller le matin en se demandant ce que te réserve la journée et partir le découvrir. C’est ça, le sentimental.

Suivant cette définition, « Au large » est un vrai roman sentimental. Le roman d’une amitié improbable entre Robert – un jeune garçon quittant sa campagne natale pour échapper à la mine, avec un but : voir la mer – et Dulcie, une quinquagénaire solitaire, cultivée et anticonformiste, vivant dans un cottage perdu au milieu de la nature, en compagnie de son Majordome canin.

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les privations touchent durement toute la population. Pourtant – et malgré son isolement –, Dulcie possède des réserves étonnantes (une cave bien remplie, des fraises surgelées, du homard et du poisson fraîchement pêchés) et des livres à foison. Autant de victuailles dont elle fera profiter Robert, lui ouvrant les papilles et l’esprit en l’initiant à des mets raffinés et à la poésie. Celui-ci la paye en retour en effectuant quelques travaux physiques d’entretien : débroussaillage du terrain et remise en étant d’un vieil atelier. C’est en triant le bric-à-brac remplissant cette cabane que Robert met la main sur des traces du passé de Dulcie. Cette découverte tissera entre eux un nouveau lien indéfectible.

Nadège

Ecole des loisirs, Romans

La fille qui parlait ours, Sophie Anderson, Ecole des Loisirs (medium)

Il était une fois une petite fille qui jouait dans la forêt, devant la grotte d’une ourse. Une femme la remarqua et, la voyant seule, l’emmena et l’adopta. Douze ans plus tard, la petite fille a grandi, grandi, grandi… jusqu’à devenir plus grande et plus forte que tous les autres enfants de son âge. Plus grande et plus forte même que sa Mamochka chérie. Tellement grande et tellement forte que tout le village la surnomme Yanka l’ourse.

Un jour, lors du Carnaval du Grand Dégel, alors qu’elle joue avec les autres enfants, escaladant un mur, Yanka glisse, refuse l’aide de son ami Sacha qui lui tend la main, et tombe. Un peu plus tard, elle se réveille dans son lit et découvre, sidérée, que ses jambes se sont transformées en pattes d’ourse. Malgré toutes ses connaissances et ses remèdes de guérisseuse, sa Mamochka lui avoue son impuissance et lui annonce que la seule solution est d’aller à l’hôpital. Ceci est impensable pour Yanka, d’autant qu’à sa fenêtre, un petit bouvreuil ne cesse de l’appeler par son surnom « Yanka l’ourse » et de l’inciter à venir dans la forêt.

Mais depuis quand Yanka comprend-elle la langue des bouvreuils ? Et pourquoi ses jambes se sont-elles transformées en pattes d’ours ? Cela aurait-il un lien avec ses origines ? Et avec les fabuleuses histoires du Tsar et de la Tsarine ours que lui raconte le pêcheur Anatoli ? Et si toutes les réponses à ces questions se trouvaient bien dans la forêt ? Bien décidée à trouver qui elle est et à guérir, Yanka fugue avec son fidèle furet, Moustache. Sur son chemin, elle rencontrera Ivan le loup esseulé, Blakiston le hibou, une maison vivante à pattes de poulets et bien d’autres étranges personnages qui, à force d’histoires et de merveilleux « il était une fois », mèneront Yanka à découvrir non seulement qui elle, mais ce qu’elle veut devenir. Finalement, humaine ou ourse, est-il si important de choisir ? L’essentiel n’est-il pas de vivre dans l’amour et la confiance de ceux qu’on aime ?

Nadège